G120
120 délégations paysannes pour appuyer le G20 et la régulation des marchés
À l’initiative de la FNSEA et de JA, 250 représentants d’organisations agricoles et paysannes de 80 pays étaient réunis à Paris pour participer et peser dans les débats sur l’agriculture et sur l’alimentation.
Ils sont venus du Mali, du Niger, du Brésil, du Japon, mais aussi des États-Unis, du Canada, de l’Uruguay… Pas moins de 120 délégations paysannes représentant 80 pays se sont retrouvées à Paris le 16 juin à l’invitation de la FNSEA et de JA. Objectif : peser sur l’issue de la réunion du G20 agricole, la rencontre des ministres de l’Agriculture des 20 pays les plus puissants de la planète. Un G20 qui, les 22 et 23 juin, doit aboutir à des mesures de régulation et de développement de l’agriculture mondiale pour un but primordial : réduire la volatilité des prix agricoles.
Marchés : “nouveau système d’information”
Dans son discours d’ouverture, le président de la République a insisté sur la nécessité de réinvestir dans l’agriculture, tant de la part du public que du privé. “Produire plus et mieux, cela ne sera possible qu’à la condition que l’agriculture redevienne un domaine d’investissement majeur”. Autres objectifs : améliorer la transparence des marchés agricoles mondiaux, renforcer la concertation internationale ou encore la recherche d’une plus grande transparence des marchés sur les données stratégiques. Pour cela, Nicolas Sarkozy préconise “la mise en place d’un nouveau système d’information sur les marchés, à l’exemple de ce qui a été fait il y a dix ans pour le pétrole”. Un discours plutôt apprécié de la part des délégations, en particulier lorsqu’il a dénoncé “les abus des marchés dérivés des matières premières”. Devant les agriculteurs du G120, le président de la République a opté pour un plaidoyer résolument anti-spéculation excessive sur les marchés à terme. Rappelant les vertus d’un “capitalisme de production et non exclusivement financier”.
Pour nourrir cette population croissante (d’ici 2050, 9 milliards d’habitants), les experts internationaux estiment à 70 % l’augmentation de la demande alimentaire mondiale, dans les quarante ans qui viennent. “Il faut donc produire plus, mais compte tenu du réchauffement climatique, la voie de l’agriculture durable est impérative”.
Pour l’instigateur de la rencontre, Xavier Beulin, un des grands objectifs de l’événement consistait à faire “renoncer au principe qu’une partie du monde doit nourrir l’autre”. L’agriculture doit être développée partout sur la planète : “L’enjeu est mondial, mais les solutions sont locales”, a même reconnu Robert Carlson, vice-président du Syndicat des producteurs américains.
L’autre objectif est de “progresser dans la gouvernance de l’agriculture”, avec une grande transparence, tant en ce qui concerne les moyens de production, l’état des stocks et la régulation des marchés financiers. En clair : abandonner “la vision monolithique” de l’OMC sur l’agriculture qui ferait de la libéralisation la solution à tout. Selon le président de la FNSEA, “les grands enjeux sont communs à tous et les grandes décisions sont à prendre au niveau international”. En revanche, “la mise en œuvre de politiques régionales ou publiques se fera à une échelle plus locale”. Comme quoi, “l’idée d’un monde plus multipolaire semble prévaloir et c’est plutôt un signe positif par rapport aux futurs enjeux”.
Hervé Garnier
Les recommandations de la FAO
Face à la volatilité, d’abord augmenter la productivité
Augmenter la productivité, tel est l’axe fort du rapport annuel OCDE/FAO, publié le 16 juin. “La volatilité pourrait bien perdurer”, indique le rapport qui consacre un dossier spécial de 29 pages à la volatilité et aux moyens de l’atténuer. Les mesures visant à augmenter la productivité et la capacité de résistance de l’agriculture “nécessiteront d’importants investissements, sachant que si la hausse des prix des produits se transmet aux producteurs dans de bonnes conditions, soutenue par des politiques agricoles efficaces, les investissements privés tireront la croissance”. Le secteur public, “lui aussi, doit investir, notamment dans le domaine de la recherche et du développement agricoles, en ciblant l’agriculture à petite échelle, pour lui permettre d’augmenter sa productivité et sa résistance face aux aléas météorologiques”. Des investissements publics, autres qu’agricoles, “sont également requis”, afin d’améliorer le cadre institutionnel général, ainsi que les infrastructures. Le rapport préconise également la réduction des pertes, du stockage des denrées à leur utilisation finale, afin d’augmenter les approvisionnements. De plus, il faut des informations commerciales de meilleure qualité. Les deux organisations internationales estiment que “davantage d’efforts devront être consentis pour perfectionner les systèmes nationaux et internationaux qui permettent de surveiller les plantations et d’évaluer les perspectives de production”. Par ailleurs, un meilleur fonctionnement des marchés est requis, notamment “des règles applicables à l’ensemble des bourses et des marchés à terme, surtout pour les opérations négociées de gré à gré en dehors des bourses de marchandises réglementées”.
ORGANISATIONS AGRICOLES
Marcela Villareal, de la FAO, et le représentant spécial de l’Onu pour la sécurité alimentaire, David Nabarro, ont dit que la première chose à faire est d’écouter, sur le terrain, les organisations agricoles. L’occasion était trop belle pour ne pas évoquer tous les freins à la production agricole locale.
Un producteur du Niger stigmatise l’absence de volonté politique, un délégué brésilien s’interroge sur les rôles respectifs des petites et grandes exploitations, un Péruvien questionne : avec ou sans des OGM ? Même richesse d’interventions lors d’une première table ronde, Lacina Tuo, président des cotonniers de Côte-d’Ivoire, appelle de ses vœux des outils de transformation industrielle sur les zones de production du tiers monde, ou encore Christian Pèes insiste sur la complémentarité des filières agricoles entre le Nord et le Sud, deux hémisphères qui doivent éviter de s’affronter en direct sur les prix.