Dossier épandage
L’évolution des contraintes va changer la donne
Les éleveurs du Maine-et-Loire vont devoir s’adapter à la nouvelle directive nitrate.
L’actualité fait que l’épandage se lie particulièrement à une notion de contrainte. Le renforcement des actions mises en œuvre par rapport à la directive nitrate et l’élargissement de la liste des communes appartenant à la zone vulnérable, mobilisent l’inquiétude de nombreux éleveurs dont certains se sont retrouvés pour une manifestation à Orléans il y a quelques jours. Dans le Maine-et-Loire, le calendrier des périodes où l’épandage est interdit devient plus restrictif. Pour les éleveurs, cela se traduit par une capacité de stockage des effluents qui devra être supérieure pour respecter les normes, d’autant que le stockage du fumier au champ est dans le viseur des institutions.
Refonte des pratiques“Certains collègues vont devoir revoir leur fonctionnement”, analyse Pierre-Yves Bregeais, aviculteur à Chazé-Henry. Sur son exploitation, il dispose d’une plateforme pour le fumier de ses poulaillers : “à l’origine, j’élevais des taurillons, j’ai arrêté pour l’aviculture au début des années 2000 en construisant des bâtiments neufs.” Depuis que Valentin, son fils a récemment rejoint la structure, ils exploitent 2 500 m2 de bâtiments et 117 ha de SAU. “Une partie de nos bâtiments est en location, le propriétaire en reprend une partie et le reste des effluents de ce site part sur une plateforme de compostage. Sur le site que nous avons en propriété, 550 t de fumier par an sont produites. Sur 117 ha, ça passe tout juste au niveau des normes même si ça ne fait que 4,7 t /ha”, calcule l’éleveur. Dans le nord-est du département, l’inquiétude vient de l’intégration d’une grande partie du territoire à la carte de la zone vulnérable.
Jean-Philippe Rétif est installé à Blou, commune concernée par l’extension du zonage, sur un élevage laitier où Romain Baron s’est installé aussi en 2007. “En 2010, en pleine crise laitière, nous avons aménagé une fumière”, dans le cadre d’une mise aux normes, pour un coût d’investissement de 50 000 6. Avec cette évolution, cette fumière ne sera plus suffisante, “il va falloir doubler le bâtiment”, s’insurge l’éleveur agacé par l’incohérence des nouvelles contraintes. En repoussant les dates d’épandage, “nous irons dans les champs à des moments où nous abimerons plus le terrain et risquons de laisser plus de boue sur les routes… Aujourd’hui, nous implantons des Cipan là où ça se justifie, dans les terres sableuses par exemple, mais là, nous allons devoir en faire partout.” Or, entre l’implantation, la destruction, voire l’irrigation pour favoriser la levée, “où est le gain sur le plan environnemental avec tous ces passages de matériel ?”, et sur le plan économique, les avantages techniques “ne couvrent pas le coût. Qui payera ?”
Refonte du
paysage agricole
Adjoint au maire sur sa commune, Jean-Philippe Rétif note que cette évolution réglementaire risque d’être source de démotivation. “Sur six éleveurs de bovins laitiers dans la commune, trois pensent ne pas continuer à cause de cette réglementation alors qu’ils ont des belles structures. Sur certaines communes voisines, l’élevage va même totalement disparaître.”