CAPRINS
Une mobilisation nationale pour sauvegarder la filière
400 éleveurs de chèvres de toute la France ont répondu à l’appel de la Fnec pour dire non à la baisse du prix du lait. La FDSEA, JA, et l’Union caprine étaient présents.
pour dire non à la baisse du prix du lait de chèvre que les entreprises voulaient imposer au 1er janvier 2012.
Pour François Poirier, président de l'Union caprine 49, c'est “un gros chantier” qui s'est ouvert mardi à Surgères (Charente-Maritime) : celui de la gestion de la collecte par rapport à la demande de la consommation. Un dossier qui va au-delà du prix du lait. La négociation avec les entreprises Eurial et Glac avait pourtant mal débuté, Eurial éludant le prix et le Glac annonçant que l'entreprise ne pouvait s'engager au delà d'un mois de non-baisse. C'était sans compter sans la détermination des éleveurs venus de toute la France. “Nous avons redit que les éleveurs se trouvaient dans des situations catastrophiques et que leur présence nombreuse montrait leur réelle détresse.” L'intervention du sous-préfet a débloqué la situation dans l'après-midi en mettant autour de la table les représentants du Glac dont Patrick Charpentier, vice-président chargé du dossier caprin. “Nous étions bien décidés à ne pas lever le camp sans la garantie du maintien du prix jusqu'au 31 mars”, poursuit François Poirier, “délai minimum pour permettre d'avan-cer avec le Crédit agricole, banque de l'entreprise, et les pouvoirs publics”. Au bout d'une heure d'échanges téléphonique entre la banque, le ministère de l'Agriculture et la préfète de Charentes, Béatrice Abol-Olivier, les éleveurs obtenaient l'assurance que chacun allait s'engager pour trouver une solution afin que, d'une part, les éléveurs ne soient pas pénalisés et que la situation de l’entreprise soit examinée. La situation du Glac est en effet fragile depuis plusieurs années et l'intervention des banques et de l'État est indispensable pour le secteur caprin, mais aussi pour l'ensemble de l'entreprise. En cause, en chèvres, le surstock dû à des achats de caillés aux Pays-Bas. “Cela a débouché sur une baisse de 40 euros les 1 000 litres”, poursuit le président de l'Union caprine, sans compter un resserrage draconien des références sur les non réalisés, un rognage des références, etc. Aujourd'hui, les producteurs de lait de chèvre du Glac ne sont plus en situation de financer quoi que ce soit”.
L’engagement de l’État et de la banque
L'engagement de l'État et de l'organisme bancaire vient redonner un peu d'espoir aux éleveurs. “Nous ne sommes pas venus pour rien”, apprécie François Poirier. “Nous sortons la tête haute et avec des avancées positives”. La première d'entre elles : la réunion, ce vendredi à 17 h à La Rochelle, entre l'entreprise, l'État et la banque. “Ce sera difficile, mais c'est en bonne voie”, veut croire le responsable professionnel caprin qui souhaite le maintien de l'outil de transformation. Car François Poirier sait bien que le prix du lait payé aux éleveurs du Glac est déterminant pour l'ensemble des éleveurs : “Si le prix baisse, il y aura un effet domino sur toutes les entreprises. C'est la raison pour laquelle des éleveurs autres que ceux du Glac étaient à nos côtés à Surgères”, apprécie-t-il. Le président de l'Union caprine pose ainsi, de façon sous-jacente, la question du rôle de l'interprofession caprine dont il entend bien “qu’on continue à en discuter : l'interprofession doit se remobiliser et reprendre de la force”, affirme-t-il. Les éleveurs, au lendemain de ce rassemblement, sont très motivés. L'unité autour de la Fnec est formidable. Elle montre la détermination des éleveurs et l'importance des enjeux pour toute la profession".
M.L.-R.
Alain Cholet, président de la FDL
Instaurer le dialogue dans la filière caprine
Quel regard portez-vous sur ce qui se passe aujourd'hui entre les producteurs lait de chèvre et leurs entreprises ?
Alain Cholet : Il y a un vrai contraste entre des producteurs de lait de chèvres, jeunes, dynamiques, performants sur le plan technique et économique et une entreprise, en l'occurrence le Glac, avec des outils de transformation vétustes et peu performants. Si on ajoute la gestion financière inappropriée qui a fragilisé l'entreprise et le manque de concertation, tous les ingrédients sont réunis pour une crise telle qu'on la connaît aujourd'hui et telle que les éleveurs la voient venir depuis plusieurs mois.
Était-il possible de faire autrement ?
On peut penser que s'il y avait eu dialogue, la variable d'ajustement ne serait pas le prix payé aux éleveurs, mais bien la gestion des caillés achetés aux Pays Bas.
On est devant le problème d'une entreprise ou le problème du fonctionnement de la filière ?
En production de lait de chèvre, quand une entreprise tire les prix vers le bas, toutes les entreprises en profitent. La diminution de la consommation n'explique pas tout. Le vrai problème, c'est le mode de relation avec les entreprises, puisque le prix n'est pas fixé en interprofession comme pour le lait de vache. Quand des entreprises laitières ont connu des difficultés et ont payé moins, les autres entreprises ont maintenu le prix fixé en interprofession.
Une solidarité "à la Entremonts" est elle envisageable ou souhaitable ?
Peut-être mais cela implique une grande vigilance sur l'utilisation de ce fonds. Il ne faudrait pas que la solidarité des éleveurs de lait de chèvre serve à structurer la globalité de l'entreprise. Il faut que cet argent aille au secteur caprin car le lait de chèvre a fait les beaux jours du Glac. Reste aussi à savoir si les éleveurs, qui touchent déjà une moindre rémunération, en ont aujourd'hui les moyens.
Quel soutien peut apporter une structure comme la FDL ?
La FDL a de l'expérience dans la construction d'une réflexion en filière. Elle peut amener sa vision des choses, son expérience de crise avec des entreprises en difficulté. Concernant le Glac, je pense que les pouvoirs publics doivent être mis au courant de ses difficultés, car de nombreux producteurs sont concernés, en vache comme en chèvre, dans une région Centre où les coûts de collecte sont importants. Et pourquoi pas, que les pouvoirs publics interviennent de façon ponctuelle et que ce répit soit mis à profit pour ouvrir le chantier de la rénovation.
Propos recueillis par M. L.-R.
Les raisons de la crise
Il y a dix ans, la consommation augmentait de 4 à 6 % par an, avec un niveau d’importation dans les années 2006 à 2008 de 25 %. En 2006-2007, l’interprofession, Anicap, met en place un plan de pérennisation, “pour être indépendant du marché espagnol ou hollandais” a expliqué le président de la Fnec. L’objectif était pour 2012 d’atteindre un équilibre entre la production française et les importations. De nombreux jeunes éleveurs ont reçu donc des courriers les incitant à produire. “Hélas, il y a eu télescopage” et depuis deux ans, la filière est en crise. “Cela se traduit par des surstocks importants et une guerre commerciale entre les principales entreprises”, explique Jacky Salingardes.