Crise
1,650 milliard d’euros en soutien à l’agriculture
Nicolas Sarkozy a répondu partiellement aux attentes des agriculteurs, avec un plan de soutien d’urgence. Il a surtout chargé la future LMA de redonner compétitivité à l’agriculture.
À Poligny, dans le Jura, le 27 octobre, devant un auditoire clairsemé, Nicolas Sarkozy a annoncé un plan de soutien exceptionnel pour répondre à la crise de l’agriculture française. Pour ce « secteur stratégique », « élément incontournable de notre identité nationale », le Président de la République a annoncé un milliard d’euros de prêts bancaires et 650 millions d’euros de soutiens « exceptionnels ». Ces prêts vont bénéficier d’un différé d’un an et l’État doit apporter 60 millions pour qu’ils soient bonifiés. Mais ces prêts ne bénéficieront pas d’un taux zéro comme le réclamaient la FNSEA et JA, mais d’un taux de 1,5 %, voire de 1 % pour les jeunes agriculteurs. De plus, une enveloppe de 200 millions d’euros va venir alléger les charges d’emprunt de 2009 et 2010 pour les agriculteurs en difficulté, et pour « accompagner les restructurations des exploitations ».
L’État prendrait en charge les cotisations MSA des agriculteurs en 2009, pour 50 millions d’euros, ainsi que sur la taxe du foncier non bâti, pour 50 millions également. En outre, le remboursement des taxes intérieures sur les produits pétroliers (TIPP) et sur le gaz naturel (TICGN), est reconduit en 2010 pour 170 millions d’euros. Enfin, le remboursement des trois quarts de la taxe carbone en 2010, correspondra à 120 millions d’euros. Ces soutiens doivent être engagés avant la fin de l’année 2009.
Par ailleurs, Nicolas Sarkozy a dit vouloir, répondre structurellement à la crise, par une « régulation rénovée de l’agriculture et de l’agroalimentaire » en Europe et au niveau mondial. Alors qu’il va falloir nourrir de plus en plus de monde, et face à une volatilité très forte des prix agricoles, la France prône la mise en place de « véritables outils de régulation ». Nicolas Sarkozy demande à la Commission européenne d’agir pour limiter la spéculation croissante sur les marchés agricoles, et « d’encadrer les produits dérivés sur ces marchés ».
Mais le Chef de l’État s’est, en fait, borné à décliner les objectifs que la France attend devoir assigner à la Pac de 2013. Préférence communautaire renouvelée, création d’outils de gestion des marchés comme le marché de l’intervention, agriculture respectueuse de l’environnement, et enfin, meilleure organisation économique des filières. Dès le conseil européen du 30 octobre, la France attend que la Commission propose pour début 2010 un renforcement de la régulation des marchés laitiers. Pour autant, le Président de la République refuse tout « retour en arrière démagogique » sur la régulation, taclant de la sorte certains discours syndicaux entendus ça et là.
La future Loi de modernisation agricole
Enfin, Nicolas Sarkozy table sur la modernisation des outils de régulation français pour préparer la Pac de 2013. Et on retiendra du discours de Poligny que le Président charge la future Loi de modernisation agricole (LMA), déposée au Parlement avant la fin de l’année, que l’agriculteur doit « vivre du prix de son travail et de sa production ». Et à y regarder de près, la LMA est annoncée comme un concentré de grands changements pour le secteur agricole. Selon Nicolas Sarkozy, on y trouvera une « définition rénovée » du métier d’agriculteur qui est un entrepreneur, insiste-t-il.
« La relation contractuelle entre l’agriculteur et son client sera au cœur de cette définition », a poursuivi le Chef de l’État. Pour ce dernier, la contractualisation signifie des « contrats équilibrés et régulés par l’État (… ), déclinés dans chaque filière par des accords interprofessionnels ou par des décrets ».
Et Nicolas Sarkozy d’annoncer, dès 2010, l’application de cette contractualisation dans la filière laitière « par la loi ». Puis, la LMA devra être aussi la loi du renforcement de l’organisation économique des producteurs, selon Nicolas Sarkozy. Une meilleure organisation pour peser face à l’aval. L’occasion aussi pour le Président de la République de prôner une transparence totale dans la répartition des marges au sein des filières. Mais le renforcement de l’observatoire des prix et des marges, qu’il a également annoncé, va-t-il être suffisant pour y parvenir ?
En outre, la LMA devra permettre aux agriculteurs de se battre « à armes égales en Europe », notamment par rapport au coût du travail, comme dans le secteur des fruits et légumes. Le Chef de l’État a d’ailleurs annoncé l’exonération totale des charges patronales dues à la MSA, pour les travailleurs saisonniers, soit 170 millions d’euros. La LMA devra aussi être la loi de l’assurance des producteurs contre les aléas climatiques, sanitaires, mais aussi économiques. Le Président de la République a dit souhaiter que la déduc- tion pour aléas DPA soit adaptée par la LMA, pour « participer à la gestion des aléas économiques ».
La profession agricole attend maintenant que les promesses soient tenues, et… la LMA.
ACTUAGRI