Herbe
BCAE herbe : un éleveur pointe les incohérences des nouvelles règles
Les nouvelles règles de la conditionnalité comportent un certain nombre d’incohérences sur les BCAE herbe. Cas concret au Gaec de la Riboivière, à Saint-Léger-sous-Cholet.
« en dépit du bon sens » et pénalisent les éleveurs qui se sont mis très tôt à l’herbe.
Qu’on nous dise comment faire, avec tous les aléas liés à l’élevage et la météorologie, pour appliquer les nouvelles mesures herbe… ». Les nouvelles règles de la conditionnalité 2010 suscitent beaucoup d’inquiétude chez Jean-Yves Merieau, éleveur laitier en Gaec, avec Claude Richard, à Saint-Léger-sous-Cholet. Les deux associés ont un quota de 420 000 litres de lait, et une surface de 80 hectares. Bénéficiant de bons rendements en herbe sur leurs terres, ils se sont engagés en 2002, dans un CTE qui prévoyait entre autres, la conversion de 8,10 hectares de terres arables en prairies temporaires. À l’issue du CTE, les exploitants ont gardé des prairies parce qu’elles continuaient à être productives. Ils ont effectué des sursemis pour remettre en état certaines parcelles. Aujourd’hui ils ont 20 hectares de prairies temporaires (contre 13 en 2005), 25 hectares de prairies permanentes 5 (PT5) et 4 hectares de prairies permanentes.
Les nouvelles règles leur posent une série de problèmes, insolubles en l’état. Exemple, comment assurer la durabilité des prairies naturelles en cas d’intempéries ? Les deux éleveurs exploitent une prairie naturelle. Les pluies l’ont endommagée au point qu’ils ont dû, en 2009, la détruire et la resemer, avec un travail du sol simplifié, afin qu’elle soit à nouveau productive. « Nous pourrions être sanctionnés pour cela, explique Jean-Yves Merieau, puisque les nouvelles règles de la conditionnalité interdisent de retourner une prairie permanente, sous peine de se voir infliger une faute intentionnelle en cas de contrôle conditionnalité, soit moins 20 % sur nos soutiens Pac ».
Logique de rotation longue
Autre exemple, comment poursuivre la logique de rotation longue qui était en place dans l’exploitation ?
« Cette logique nous permet de faire des prairies, qui contribuent à restructurer le sol afin d’implanter plusieurs années après, des cultures, sans matraquer les sols », explique Jean-Yves Merieau. Sur une prairie temporaire de six ans, Jean-Yves Merieau souhaiterait semer l’année prochaine du maïs : « Je ne peux pas le faire dans l’état actuel des règles. Pour cela, il me faudrait trouver une autre parcelle de surface équivalente, soit 4,25 hectares. Je n’en ai pas ». L’éleveur refuse également de remettre en cause une organisation parcellaire qui a sa logique : elle privilégie les zones de pâturage, plutôt que les zones d’épandage, en bordure des cours d’eau et près des habitations. Par ailleurs toutes les haies et tous les arbres ont été conservés sur l’exploitation, et celles-ci délimitent des parcelles de tailles variables, pour optimiser le pâturage. C’était une des conditions imposées par le CTE et, pour l’éleveur, leur conservation va tout à fait dans le sens d’un développement du pâturage.
Les systèmes herbe figés
Aujourd’hui, Jean-Yves Merieau a le sentiment que les éleveurs qui se sont engagés, comme son associé et lui dans des systèmes herbe sont « pénalisés », car leur parcellaire se trouve figé par les nouvelles règles BCAE. « Il ne faut pas pénaliser les producteurs qui se sont engagés les premiers dans des bonnes pratiques, souligne-t-il, car cela empêcherait tout développement futur de bonnes pratiques, par crainte d’être pénalisé ensuite ».
Il dénonce les aberrations auxquelles peuvent conduire les réglementations : « à la fin de notre CTE, en 2007, nous aurions très bien eu le droit de remettre toutes nos praires en Scop puisque le CTE laissait l’égibilité des terres. Nous n’allions quand même pas faire cela ! D’autant plus que nous avions de bons rendements en herbe sur des terres plutôt humides. Nous avions bien amélioré les terres en drainant 50 hectares ». Pourtant, si ces terres étaient restées éligibles comme prévu, les éleveurs auraient plus de souplesse aujourd’hui dans leur assolement… « Il faut laisser un peu de marge de manœuvre à l’agriculteur et plus de souplesse dans l’application des règles, notamment pour qu’ils puissent chaque année sécuriser leur alimentation animale, plaide-t-il. Il faut considérer les prairies temporaires comme des cultures à part entière ». « Pourquoi changer la date de 2005 qui était la première date de référence du ratio national de prairies ? », s’interroge-t-il aussi.
S.H.