Réforme de la Pac
Dès 2010, se préparer à 2013
Les agriculteurs de Maine-et-Loire contribueront lourdement à la réorientation des soutiens. Des mesures applicables en 2010 qui viendront impacter le revenu.
Si les mesures annoncées par le ministre de l’Agriculture, Michel Barnier, sont plutôt bien perçues par l’opinion publique car cette politique agricole – telle que présentée dans le projet Objectif Terre 2020 - « plus juste, plus légitime et durable », puisqu’elle va dans le sens des engagements du Grenelle de l’environnement, les agriculteurs, de leur côté, commencent à faire leurs comptes. D’aucuns seront tentés de crier au scandale, d’interjeter des appels pour des modèles qu’hier, parfois, ils récusaient. D’autres voient dans le schéma retenu une partie de leurs attentes entendue. Mais une partie seulement. Car si la lucidité les pousse à mesurer ce à quoi les agriculteurs français ont échappé, du moins d’ici 2013 (une aide unique à l’hectare conduisant tout droit à la course à l’agrandissement), tous savent que les soutiens vont se restreindre. Le principe retenu est celui de la réorientation – et non de la convergence – et le découplage partiel des aides sur le cheptel allaitant à hauteur de 25 % de la PMTVA. Le reste des soutiens (notamment sur la Scop et la PAB) sera découplé à 100 % à partir du 1er janvier 2010. Le ministre de l’Agriculture aura donc été sensible à une certaine spécificité de l’élevage.
135 millions d’euros pour la filière ovine
On sait que le budget agricole restera préservé jusqu’en 2013 ; il aurait pu être écorné. Toutefois, la réorientation des soutiens implique que, même à budget égal, l’on prenne à l’un pour donner à l’autre. Le Maine-et-Loire sera donc contributeur. Mais si les agriculteurs savent qu’ils seront prélevés, ils ne savent pas encore de quoi seront faits les retours.
Dans ce partage, certains ont été entendus plus que d’autres. Ainsi, concernant les ovins, « c’est la première fois que l’on obtient ce qu’on demandait », souligne Jean-Marc Gaborit, administrateur de la fédération nationale ovine et responsable de la section ovine en Maine-et-Loire. Une enveloppe de 135 millions d’euros a été dégagée pour ce secteur. Et le responsable professionnel caresse l’espoir de voir se développer une production qui se trouve sur le fil du rasoir : « il reste des primes à la brebis disponibles », indique-t-il.
Prix et valorisation par la filière
« Les aides ne compenseront jamais les insuffisances du marché », estime Jean-Paul Piet, secrétaire général de la FDSEA. Il faut une compensation pour les revenus défaillants sur des critères objectifs. Ayons le courage de reconnaître que, dans certaines productions, certaines années, il y avait besoin de moins d’aides », ajoute-t-il. De l’aide, les producteurs de viande en ont besoin depuis plusieurs années. Et la date de 2010 risque de résonner comme un couperet pour certains éleveurs, craint Mickaël Bazantay. « Pour compenser le manque à gagner, il faudrait 0,30 euros par kilo », indique le responsable de la section bovine qui redoute les effets d’une conjoncture défavorable pour les éleveurs de viande. « Nos systèmes intensifs vont être très pénalisés », ajoute Michel Brossier. « Quelles sont nos possibilités d’adaptation ? Nos marges de manœuvre sont quasiment inexistantes ». En production laitière, l’horizon se couvre également avec des prévisions inquiétantes pour le prix du lait. « Le danger de la fluctuation des marchés est bien plus grand que celui des incidents climatiques », considère Alain Cholet. Les investissements réalisés dans la région, les outils de transformation en lait et en viande peuvent toutefois plaider pour un maintien des productions dans l’Ouest. « On a aussi vu des retournements de marché inattendus, tempère Christiane Lambert. Mais une remise en cause profonde des règles de fonctionnement du marché est inévitable car sur les exportations, les agriculteurs ont fait tout ce qui était possible de faire ». Pour la présidente de la FDSEA, il faudra aussi jouer avec les dispositifs fiscaux (DPI, DPA) et de gestion des risques pour lisser les bonnes années – quand il y en a. La situation sera plus claire lorsque l’on saura à quelle hauteur et pour qui s’opèrent les retours. « Il nous reste un an. Mettons le à profit pour trouver des solutions, s’organiser mieux et structurer nos filières et non nous lamenter, propose Christiane Lambert. Pour cela, renforçons nos liens avec le monde économique et avançons tous dans le même sens ».
m.l.-r.