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E-commerce, e-perspective

La défiance du consommateur vis-à-vis de la grande distribution est un avantage pour l’agriculteur. à lui de proposer ses produits via internet.

Le consommateur se tourne de plus en pus vers le e-commerce pour l’achat alimentaire. Aujourd’hui un Français sur cinq a déjà utilisé un drive.
Le consommateur se tourne de plus en pus vers le e-commerce pour l’achat alimentaire. Aujourd’hui un Français sur cinq a déjà utilisé un drive.
© AA

Le e-commerce, un moyen de vente qui a le vent en poupe. Philippe Moati, co-président de l’Observatoire Société et consommation l’a expliqué lors d’un colloque sur ce thème organisé par la Chambre régionale d’agriculture. “On dénombre 138 000 sites marchands. Ce chiffre a été multiplié par

8 en dix ans.” Le e-commerce représente 3 % des parts de marché de l’alimentaire. Un français sur cinq a déjà utilisé un drive. “Un verrou mental a sauté”, remarque le professeur. Si la technologie a fait évoluer les pratiques, les mutations de la société expliquent aussi le comportement des consommateurs. “Avec l’individualisation de la société, on assiste à une démassification de la consommation.” Bref, chaque individu est singulier, et ne consomme pas de la même manière que son voisin. “On passe d’une distribution de masse à un commerce de précision.” Ainsi, on voit fleurir plusieurs enseignes pour un même groupe.  Par exemple,   Carrefour. Carrefour city,  bio, market... à chaque consommateur son magasin.

Certaines valeurs influent aussi sur le comportement du consommateur, d’après le professeur. Entre autres, l’hédonisme. “Le consommateur rejette la contrainte.” Autre valeur :  la responsabilité. “Dans son acte d’achat, l’individu a une conscience environnementale et citoyenne. Dans le même temps, un sentiment de défiance se développe surtout envers la le capitalisme et la grande distribution.” Pour Philippe Maoti, c’est une véritable aubaine pour les agriculteurs. Le potentiel de confiance du consommateur auprès des agriculteurs est un atout majeur.

 

5 h par semaine

Tout cela, certains agriculteurs l’ont bien compris et se sont déjà lancé dans ce nouveau commerce. Ils témoignaient à la table ronde du colloque. Paul Guegen est producteur de porcs en Vendée. L’agriculteur a toujours vendu ses produits en vente directe. Si au départ, il envoyait son catalogue par courrier, il s’est rapidement mis aux mails. “C’était une demande de mes clients. Et c’est vrai que c’était plus rapide.” Concrètement, les clients passent commande, et viennent récuperer les produits au magasin des fermes de la Gourinière. En 2007, il lance son premier site internet. Il propose ainsi ses produits et ceux de 12 autres producteurs.

L’éleveur consacre “environ 4 à 5 heures par semaine” pour alimenter le site internet. Il envoie une newsletter tous les mois. “Dès que j’envoie la newsletter, la fréquentation du site augmente.” Selon lui, actualiser le site, c’est une activité qui demande des compétences spécifiques.

Aujourd’hui, le magasin propose les produits de 24 producteurs. Sur le lieu de la ferme, le développement de la vente directe a permis cinq installations en dix ans. “Nous avions un manque en légumes  frais. Quand nous avons trouvé un jeune maraîcher, nous lui avons fait de la place sur le site. Certains lui ont laissé des hectares, un autre un hangar.” Grâce à cette installation, la fréquentation du magasin a augmenté. Récemment, le groupe de producteurs a investi dans un nouveau site internet pour  2 000 6. Victime de son succès, le magasin commence à manquer de place. “Il fait 40 m2. Nous cherchons à nous agrandir. Pour quelle surface ? Doit-on s’installer plus près des consommateurs ?” Le groupe de producteurs réfléchit encore aux évolutions possibles.

 

Drive fermier

Autre département, autre moyen de vente. En Gironde, 45 agriculteurs proposent leurs produits deux drives fermiers. L’un avec des points de retrait dans la périphérie de Bordeaux, l’autre en milieu rural. à l’image du drive de la grande distribution, les producteurs proposent au consommateur de commander et payer leurs produits en ligne pour ensuite les récupérer sur des points de retrait. “300 commandes sont faites par semaine”, explique Alain Monget, de la Chambre d’agriculture de Gironde qui a accompagné les agriculteurs dans la démarche. “Le panier moyen est de 40 6. Avec le paiement en ligne, le site doit être hyper performant.” Après une formation, chaque agriculteur met en ligne les produits qu’il propose de semaine en semaine et prépare les commandes pour ensuite les livrer. “Certains n’avaient même pas internet, donc il a fallu les équiper.” Le conseiller chambre est franc : “tous les producteurs se sont plantés au moins une fois.” Si le consommateur est aujourd’hui indulgent envers l’agriculteur, Philippe Maoti met en garde. “Dans peu de temps, le consommateur sera plus exigeant, il voudra la même prestation que celle de son supermarché.” C’est pour cette raison qu’il s’interroge sur une possible alliance avec ces opérateurs. “Pourquoi pas faire de ses ennemis des alliés. Ils sont demandeurs. Ils ont la technicité, les moyens marketing que les agriculteurs n’ont pas. Ou pourquoi pas se grouper en coopérative pour refaire le chemin vers le consommateur.”

 

H. R.

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