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Foncier
Face à la pression foncière, les agriculteurs manquent de terres

Le marché du foncier agricole est de plus en plus restreint. Depuis quatre ans, ce sont les achats de résidences principales ou de terrains à bâtir qui le dominent.

© AA

«Entre 2006 et 2010, en moyenne chaque année, 78 000 hectares de terres agricoles sont devenus constructibles”, a indiqué Robert Levesque, directeur des études de la Fédération nationale des Safer (FNSafer), lors d’une présentation du marché immobilier rural 2010, le 24 mai à Paris. Pour lui, “le gaspillage de terres agricoles continue avec l’équivalent d’un département français perdu tous les quatre ans”.

Hausse pour les grandes cultures, baisse pour l’élevage

“La baisse des taux d’intérêt et le prix des productions agricoles, surtout depuis 2008, ont tendance à faire progresser les prix du foncier agraire”, a indiqué Robert Levesque. Mais cela ne dissuade pas les investisseurs non-agricoles de se positionner sur ce marché. Les parts de marché des non-agriculteurs atteignent, en 2010, 26,7 %, (25,3 % en 2009 et 24,7 % en 2008). “La terre est aussi devenue une valeur refuge, au même titre que l’or ou l’argent”, a fait remarquer André Thévenot, président de la FNSafer. Globalement, en 2010, le prix des terres et prés libres non bâtis a progressé de 1,9 % pour atteindre les 5 230 €/ha, en moyenne dans l’Hexagone.
Globalement, outre la pression de l’urbanisme, le prix des terres agricoles est très largement fonction de la valeur potentielle des productions. Le prix des terres en zone de grandes cultures a tendance à se raffermir nettement, alors qu’en zones d’élevages il a tendance à se déprécier. De plus, “les terres agricoles à proximité de grands centres urbains, de voies de communications ou de littoraux sont les plus convoitées par l’urbanisation”, explique Robert Levesque.

Une forte rétention

La baisse de terres agricoles échangées sur le marché est le fait de plusieurs facteurs. Selon la FNSafer, la surface agricole utile (SAU) a diminué de 7 Mha entre 1960 et 2010. De plus, l’extension des fermages sur des baux longs fait que les terres sont de moins en moins mises en marché. Ainsi, si en 2007 le fermage concerne 74 % de la SAU, contre 63 % en 2000, ce chiffre approche les 80 % en 2010. Une forte rétention est aussi observée sur ce marché du foncier agricole. En effet, les propriétaires ont tendance à ne pas mettre leurs biens sur le marché en attendant l’arrivée des villes. Enfin, le développement des formes sociétaires en agriculture permet le changement de main des terres sans passer par le marché grâce au transfert de parts sociales. La FNSafer montre aussi que depuis 2000 une baisse de 28 % des surfaces acquises par des personnes physiques agricoles est observée. Alors que dans le même temps une progression de 15 % des sociétés d’exploitation agricoles et de 59 % des groupements fonciers agricoles (GFA) ou SCI agricoles est mesurée en terme de surfaces agricoles acquises. “Depuis dix ans, le nombre de biens libres non bâtis a baissé de 30 %”, indique un rapport de la FNSafer. Et la baisse s’est poursuivie en 2010 avec - 5,9 % de biens libres non bâtis disponibles sur le marché.

Des mesures peu efficaces

Les terres nues rendues constructibles sont pourtant souvent parmi les plus propices aux activités agricoles, en raison de bonnes réserves en eau notamment. Pour freiner le changement d’affectation des terres, une taxe sur les plus-values de ventes de terrains nus devenus constructibles est imposée depuis l’entrée en vigueur de la Loi de modernisation de l’agriculture. Cette taxe permet une répartition sociale des plus-values à destination de l’installation des jeunes agriculteurs.
Cependant, la mesure s’est révélée peu efficace avec une taxation d’au maximum 10 % du prix de vente face à une plus-value de soixante fois le prix du foncier agricole pour de l’urbanisation. Enfin, “la révision des plans locaux d’urbanisme (Plu) est pilotée par les communes qui décident de rendre ou non constructible un terrain agricole”, insiste André Thévenot. Il demande d’ailleurs que les commissions de déclassement des terres de l’agriculture vers le constructible, présidées par les préfets, aient, plus qu’un rôle consultatif, un pouvoir décisionnel, car pour le moment leurs avis ne sont pas opposables aux décisions des communes. Enfin, afin d’améliorer la transparence du marché foncier en France, les Safer ont lancé le portail Vigifoncier.fr à destination des collectivités territoriales, des services déconcentrés de l’État et des différents acteurs de l’aménagement du territoire ou de l’urbanisme. Les projets de vente de biens y sont répertoriés et cartographiés et des indicateurs de suivi et d’analyse des dynamiques foncières locales y sont proposés.

AGRAPRESSE

RÉACTION

François Beaupère : “Un foncier adapté aux projets agricoles”

Le rapport de la FNSafer “Marché de l’immobilier rural 2010” sur la disponibilité des terres pointe une pression toujours accrue pour des usages non agricoles. Qu'en pensez-vous ?
François Beaupère : force est de constater, effectivement, que ce qui part vers le loisir, l'urbanisation et les zones d'activité est toujours aussi important malgré la volonté affichée des politiques. Il faut que la profession continue à insister sur un maintien, voire un renforcement des règles de densification et une meilleure utilisation du sol dans les zones d'activité. Une nouvelle commission a été créée, vendredi dernier, sous l'autorité du préfet : la CDCEA, Commission départementale de consommation de l'espace agricole. Sa mission consiste à donner un avis sur la consommation des espaces dans les documents d'urbanisme, les Scot, les Plu ou encore les cartes communales. Un avis seulement. J'aurais aimé que cette commission ait un rôle plus fort, puisse émettre un avis opposable qui permette de refuser un projet s'il consomme trop d'espace. On assigne à cette commission un rôle d'observatoire plutôt que celui d’un outil de contrôle.

Considérez-vous qu'il y a assez de terres disponibles pour les candidats à l'installation ?
Quels sont les projets à valider ? Doivent- ils être basés sur les schémas des cédants ? Peut-on accepter deux installations sur la même surface initiale ? Comment compenser les agriculteurs touchés par l'urbanisation ? Quand on a répondu à ces questions, on peut aborder la question de la taille du foncier. Le foncier est le support pour la production, pour les règles environnementales, pour les aides européennes encore. Parfois,
pèse dans la décision le contexte socio-professionnel.

Quels outils, quels moyens pour préserver l'espace agricole ?
La maîtrise de l'espace agricole s'affiche avec beaucoup d'ambition dans les documents d'urbanisme. Mais pour l'installation, le SDDS, avec la CDOA, reste l'outil principal avec un projet agricole départemental ambitieux en faveur de l'installation.

Le prix des terres, en Maine-et-Loire, a augmenté de 3 % sur un an et de 20 % sur sept ans. Que pensez-vous de cette évolution ?
Il faut relativiser les chiffres, car ils sont le constat d'un prix moyen de toutes les ventes réalisées, quelle que soit leur destination. Des terres qui partent pour du loisir font monter la moyenne. Des agriculteurs à même d'acquérir des terres en fermage poussent parfois inutilement à la hausse. Ceci dit, 3 % équivaut à l'augmentation du coût de la vie. Cela ne me paraît donc pas excessif comparativement à d'autres départements ou à nos voisins européens.

RECUEILLI PAR MARTINE LEROY-RAMBAUD

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