Syndicalisme
Jeunes agriculteurs veut redynamiser son réseau d’adhérents
Après l’organisation économique, l’année dernière, la question de l’engagement professionnel a fait l’objet de réflexions, lors de l’assemblée générale de JA 49, le 10 mars.
“Nous avons sondé nos adhérents et le constat est à la fois rassurant, parce que les jeunes sont majoritairement en phase avec le travail que nous faisons. Mais c’est aussi inquiétant, parce que la mobilisation n’est pas au rendez-vous”, résume Frédéric Vincent, président de JA Maine-et-Loire. Cet hiver, au cours des 17 réunions cantonales ou intercantonales, une enquête a été menée pour mieux connaître les attentes des membres du réseau. 118 réponses exploitables ont été obtenues, dont les deux tiers proviennent d’adhérents JA. Les détails ont été présentés à l’assemblée générale du 10 mars. Pourquoi adhère-t-on ? Avant tout pour se rencontrer. Pour 77 % des interrogés, c’est pour échanger avec des jeunes sur le milieu agricole, pour 41 %, pour bénéficier de certains services, pour 40 %, parce qu’ils sont d’accord avec les idées, et 36 % parce qu’ils sont prêts à s’investir. Mais seulement un quart jugent leur canton actif. Les deux tiers des jeunes qui ne participent pas aux réunions cantonales évoquent le manque de temps comme principale raison. Qu’attendent-ils du syndicat ? Sans surprise, pour eux la priorité de JA doit aller à l’accompagnement des jeunes dans leur installation.
Ce constat en main, les responsables syndicaux ont mené une réflexion sur la mission du syndicat, son fonctionnement. Elle s’inscrit dans le cadre d’un vaste projet national que JA National a nommé “Réso’rganisation”, qui vise à favoriser l’engagement, gagner en efficacité et accroître la légitimité du syndicat. En Maine-et-Loire, JA veut renforcer le lien entre canton et département, en densifiant le réseau local. Objectif : avoir un représentant par canton au conseil d’administration.
Une méthode de recherche d’adhérents
Et pour attirer de nouveaux venus, les administrateurs départementaux ont prévu toute une palette d’outils et de moyens pour aider les présidents cantonaux : des trames de réunions, un Guide du président, un Guide de bienvenue du nouvel installé, mais aussi une méthode de recherche d’adhérents potentiels installés ou non, etc. Le syndicat entend aussi renforcer sa représentativité au sein des collectivités locales, des Scot, des Plu. Il tient à maintenir les animations festives, qui contribuent à créer des dynamiques de groupe. Et, si le syndicalisme repose avant tout sur des valeurs collectives, il ne faut pas négliger l’aspect enrichissement personnel ou professionnel. “Chacun doit pouvoir trouver dans son syndicat une valeur ajoutée à apporter sur son exploitation”, affirme le rapport d’orientation. “Le “je” est à considérer autant que le “nous”, souligne Valéry Lebouc, administrateur sortant. On pourrait redynamiser les groupements d’achat par exemple”.
Acteur, plutôt que consommateur
Pour Frédéric Vincent, la question du temps n’est pas une vraie raison du non engagement. Sans nier la charge de travail importante sur les exploitations, il pense qu’il faut distinguer la notion de temps de celle de priorité, et qu’il est possible d’être plus efficace. “En répartissant au mieux les tâches, en impliquant le plus possible de monde, en faisant en sorte, aussi, que les adhérents ne se placent pas dans une situation de consommateurs mais d’acteurs, porteurs de projets collectifs, on pourra gagner en efficacité”, assure-t-il.
JA avait invité trois intervenants à exposer leur vision de l’engagement syndical. Joël Limouzin, président de la FRSEA et ex-JA, est entré dans la structure pour surmonter les difficultés rencontrées au moment de son installation, dans les années 1980 : “J’y ai trouvé un accompagnement, un ressort pour avancer”. François Thabuis, secrétaire général adjoint de JA national, éleveur laitier en Haute-Savoie, installé en société en hors-cadre familial, considère son engagement comme indispensable à son équilibre.“Je suis assis sur un tabouret à trois pieds, l’exploitation, la vie familiale et sociale, et le syndicalisme”, résume-t-il.
Être plus présent dans la formation
L’engagement, “c’est une manière de s’intégrer dans des démarches collectives de manière à être capable de tenir le cap, malgré les conjonctures difficiles parfois”, a souligné le troisième intervenant, Roger Le Guen, enseignant chercheur en sociologie à l’Ésa. Mais les motivations évoluent : “Chez les plus jeunes, on observe un type d’engagement plus calculé, qui porte sur des actions et des activités précises, et dont ils veulent voir les résultats. Beaucoup de jeunes ont peur d’un engagement irraisonné”. Même si, a rappelé Roger Le Guen, les agriculteurs restent une profession beaucoup plus mobilisée que d’autres, “s’engager ne va plus de soi aujourd’hui. Les individus n’ont jamais été autant en relation entre eux, grâce aux réseaux sociaux, mais en même temps les institutions sont rejetées. Il faut donc que ces institutions accueillent les jeunes et aillent vers eux. Beaucoup de gens non engagés me disent simplement : “nous n’avons jamais été invités”. Pour lui, “JA devrait être encore plus présent dans l’ère de la formation”. La tournée cantonale a permis de constater une faible adhésion des étudiants, stagiaires, agents du service de remplacement. Tout un public à remobiliser.
Enfin, les relations entre syndicalisme jeune et aîné ont été largement abordées aussi. JA, vivier de jeunes responsables professionnels, prépare l’avenir. “Il faut prendre soin des JA, c’est la relève pour le syndicalisme aîné”, soulignait François Thabuis.
S.H.
ÉLECTIONS
Un conseil d’administration renouvelé
Un nouveau conseil d’administration, composé de 18 membres, a été élu pour un mandat de deux ans. De gauche à droite : Jérôme Maugeais, Samuel Ricou, François Arthus, Laurent Bessonneau, Régis Gatineau, Sébastien Poitrineau, Jérôme Delêtre (coopté Chambre d’agriculture), Yvan Poirier, Alexandra Blanvillain, Sylvain Piet, Bruno Lebreton, Bénédicte Lebouc et Matthieu Herguais.
À la tribune, Yannick Forestier, Antoine Lardeux, Frédéric Vincent.
Absents sur la photo : Nathalie Bessonneau (cooptée Chambre d’agriculture), Éric Foulonneau.
Interview
Jean-Paul Piet, secrétaire général sortant de la FDSEA.
L'importance de l'engagement
Jean-Paul Piet a l’enga-gement chevillé au corps. Il quitte aujourd’hui son poste de secrétaire général de la FDSEA qu’il occupait depuis 2001. Comment, de syndicaliste, devient-on militant ?
Jean-Paul Piet : j’ai commencé dans le syndicalisme à l’échelon communal, ensuite au canton et enfin au département. Petit à petit, des dossiers m’ont été confiés. On devient militant, me semble-t-il, lorsqu’on accepte de con-duire ces dossiers en essayant aussi d’être fédérateur.
Être militant syndical, c’est difficile ?
Ce n’est pas très gratifiant tous les jours. On est considéré comme se plaignant tout le temps. On a des prises de position difficiles qui risquent de déplaire. Mais c’est riche du point de vue relationnel et humain. L’important, c’est de rester droit dans la ligne du syndicat dans lequel on se reconnaît. Rester cohérent. Au prix parfois de ne pas se faire que des amis.
Au cours de toutes ces années d’engagement, y a-t- il quelque chose qui vous a particulièrement touché ?
J’ai connu un moment très difficile en 2009, avec l’Apli. Je n’ai pas compris ce qui s’est passé chez certains agriculteurs que je côtoyais auparavant. La FDSEA et ses responsables sont soudain devenus des bêtes à abattre. J’en ressens encore aujourd’hui de l’incompré-
hension et je reste blessé par la haine de la part de gens pour qui j’avais estime et respect. La FDSEA n’était pas la bonne cible. J’ai été choqué que certains de ces leaders séduisent des gens qui avaient peut-être moins de recul. Ils leur ont fait croire au grand soir. Mais les 400 euros ne sont pas venus.
Je pense que les responsables de l’Apli portent une lourde responsabilité dans le désarroi et le découragement de certains agriculteurs. Ils ont fait du mal à la profession tout entière car ils ont cassé une certaine unité agricole au point que certains, aujourd’hui, ne croient plus à la défense de groupe.
Vous pensez toujours que c’est ensemble que la profession agricole peut s’en sortir ?
Plus que jamais. Si on avance en ordre dispersé, si on affiche nos divergences, comment peser face à la transformation et à la grande distribution ? Si on n’est pas solidaire, comment garantir l’accès à une information neutre ? Je crois encore à l’organisation par la base et c’est là le rôle de notre syndicalisme.
Des dossiers ont-ils, au contraire, conforté votre motivation ?
Il y a, oui, des dossiers dont je suis fier. Le plus emblématique, pour le Maine-et-Loire et les Mauges, c’est la mise en place de la ZFPA. Un dossier que l’on a fait partager à l’administration et sur le terrain. Je pense aussi à l’action de solidarité avec le Tarn, en 2003, pour l’envoi de fourrage. Et puis, la mise en place de la charte des contrôles grâce à laquelle on a tenu compte de la dimension humaine. Ces actions donnent un sens à l’engagement.
Mener de front vie professionnelle et engagement, est-ce facile ?
Il faut concilier les réunions et le travail sur l’exploitation et savoir mettre des priorités. Un engagement syndical, c’est aussi un choix familial. Il y a forcément du monde en coulisses, en l’occurrence mon épouse.
Que pensez-vous du renouvellement ?
Un peu d’inquiétude par rapport parfois au manque de motivation. La surcharge de travail et la montée de l’indivi-dualisme n’arrangent rien, mais je souhaite vraiment que chaque exploitant puisse garder un peu de temps pour la défense collective du métier. Mais c’est à nous, responsables, progressivement, d’amener d’autres à s’engager. Cela signifie aussi qu’il faut accepter que d’autres fassent autrement, ce qui n’est pas toujours évident.
C’est une des raisons qui vous ont amené à ne pas renouveler votre mandat de secrétaire général ?
J’ai fait douze ans. J’ai porté des projets et je pense que, dans la mesure où les choses évoluent, c’est à d’autres, qui ont cette vision de l’évolution, de le faire. Cela ne veut pas dire que je n’apporterai pas ma contribution.
Un Jean-Paul Piet non engagé, ce n’est pas imaginable ?
Je n’ai pas de plan de carrière. Au terme de toutes ces années, j’ai d’abord envie de souffler un peu. Mais je pars serein car je sais que la FDSEA va continuer à faire du bon boulot. Il faut rester modeste. On parle beaucoup du travail fait, mais il en reste à faire pour ceux qui restent. C’est ce travail-là le plus important.
Recueilli par M. L.-R.
JEUNES AGRICULTEURS
Neuf jeunes exploitants agricoles du Maine-et-Loire ont participé à une formation
Régis Baudouin, Jean-Marie Dauve, Vincent Frémy, Régis Gatineau, Jérôme Lambert, Bénédicte Lebouc, Bruno Lebreton, Sylvain et Claire Piet ont participé à la formation “De la réflexion à l’action collective”.
Le syndicat Jeunes agriculteurs 49 organise tous les ans cette formation de six modules de deux jours. Totalement gratuite, elle est destinée et ouverte aux jeunes déjà impliqués ou non dans une organisation professionnelle agricole pour leur permettre de mieux connaître leur environnement professionnel agricole et d’en devenir acteurs.
De décembre à février, des intervenants de différents horizons sont venus échanger avec les stagiaires. Négociations internationales, gestion des marchés en passant par les techniques d’animation de réunion ou de conduite de projet, les compétences abordées durant les différents modules ont allié ouverture d’esprit et savoir-faire pratique.
Le groupe initié à l’animation, a abouti, grâce à son dynamisme, à la réalisation d’un projet collectif autour du thème des énergies renouvelables. Leur projet se déroulera en deux temps et repose sur deux activités :
- la visite d’une exploitation équipée d’un méthaniseur courant mars ;
- l’organisation d’une Rando ferme lors du Festival de la terre le 21 août prochain.
Ces projets seront présentés sur le stand JA, lors du festival de la Terre les 20 et 21 août à
Jallais.
Cette nouvelle promotion qui tire un bilan positif : “Concret, formateur, enrichissant…”, tels sont les qualificatifs que les participants ont employés à l’issue des sessions. “Prendre du temps pour appréhender son environnement donne du recul et permet de se ressourcer” (voir ci-contre).
À l’issue de la formation, plusieurs d’entre eux ont pris de nouvelles responsabilités dans diverses OPA.
La prochaine session débutera en décembre 2011. Renseignements au 02 41 96 76 73.
Marion Mougeot