Dossier spécial épandage
Les conséquences des nouveaux programmes d’actions nitrates
Réaction d’Arnaud Jeanson, responsable environnement de la FRSEA, face au futur programme d’action régional prévu à l’été 2013 qui remplacera les actuels programmes nitrates.
Depuis le 1er septembre, de nouvelles mesures nationales se superposent aux programmes nitrates départementaux : quels sont les points forts des négociations en cours ?
Arnaud Jeanson : D’abord, nous voulons faire reconnaître les progrès déjà réalisés. Après quatre programmes d’actions nitrates, la qualité de l’eau se stabilise, voire s’améliore, dans certains bassins et nappes. Une tendance favorable est amorcée (nitrates et phosphore), et les modifications actuelles des pratiques vont continuer à donner des effets dans les années à venir. C’est important de le mesurer avant de modifier la réglementation. Nous l’avons rappelé à la Draaf en juillet, et la semaine dernière à l’Agence de l’eau, dans le cadre de l’état des lieux pour la révision du Sdage*.
Un autre élément important pour nous : l’agronomie. C’est la base du raisonnement de la fertilisation, et nous souhaitons maintenir ce principe. Il n’est pas question de nous voir imposer des plafonds de fertilisation ou des capacités de stockage forfaitaires, inadaptés à la variabilité des situations.
Le nouveau programme a-t-il des conséquences sur les épandages en zone vulnérable dès cet automne ?
Oui, les calendriers d’épandage sont modifiés. Par exemple, les lisiers sont interdits sur cultures d’automne dès le 1er octobre. Sur toutes cultures, y compris les spécialisées, il est interdit d’épandre tout fertilisant de mi-décembre à mi-janvier.
Le deuxième point important concerne les rejets d’azote par les vaches laitières. Mes vaches ne produisent plus 85 kg d’azote par an, mais 95 kg. Et l’année prochaine, elles produiront 111 kg par an. Je m’explique : à la place d’une valeur forfaitaire, nous avons maintenant des rejets d’azote variables en fonction de la production laitière, et du temps passé à l’extérieur. Avec ces nouvelles valeurs, une exploitation dont les apports en azote organique sont proches du plafond de 170 unités/ha de SAU, risque donc de manquer de surface épandable. Paradoxalement, les systèmes herbagers sont les plus pénalisés. Une demande de dérogation est en cours pour éviter de mettre ces systèmes en difficulté. Le système de calcul de ces rejets n’est d’ailleurs pas clair du tout, une vache y perdrait son veau.
Depuis des mois, nous dénonçons le manque de lisibilité de ce nouveau programme, l’impossibilité de l’appliquer dans ces délais, et l’incohérence avec l’objectif de maintien des prairies. Mais la pression du contentieux européen sur l’État français a eu raison du bon sens.
Et concernant le stockage des effluents d’élevage ?
Nous avons réussi à maintenir l’autorisation de stocker les fumiers compacts au champ, et le calcul des capacités de stockage des effluents sur la base du Dexel. Malgré tout, les cheptels ayant évolué de plus de 10 % depuis leur dernier Dexel vont devoir vérifier que leurs capacités de stockage sont suffisantes pour respecter les nouveaux calendriers. On sent que, pour le 5e programme nitrates, l’administration voudrait imposer un Dexel simplifié avec des valeurs forfaitaires en fonction du temps au bâtiment. Mais il n’est pas question pour nous de remettre en cause les mises aux normes réalisées, en général loin d’être remboursées en totalité, si l’évolution du cheptel ne le justifie pas réellement.
Quelles sont les prochaines étapes pour ce 5e programme d’actions nitrates ?
Il va être négocié cet automne au niveau régional, après un cadrage par un arrêté national (en cours). Les représentants des FDSEA, Chambres d’agriculture et JA se sont organisés pour contribuer au débat régional. L’obligation de couverture des sols en hiver, les capacités de stockage et les conditions d’épandage (sols en pente, gelés…) vont être débattus. La principale nouveauté sera un programme “renforcé” dans les anciennes Zones d’excédent structurel (Zes) et Zones d’actions complémentaires (Zac), voire sur certains captages ou bassins versants. Ce futur 5e programme devrait entrer en vigueur à l’été 2013.
En parallèle, le Sdage entre en révision. Là aussi les enjeux sont forts pour les pratiques agricoles, notamment pour la fertilisation en phosphore.
Marie Calmejane
* Schéma directeur d’aménagement et de gestion des eaux.
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