FDSEA
Paroles de terrains et pistes d’avenir
Le malaise et le manque de lisibilité concernent bien toutes les productions. C’est ce qui ressort des tournées régionales.
Le malaise et le manque de lisibilité concernent bien toutes les productions : de Cholet à Pouancé, de Noyant à Vihiers, c’est bien le trait commun des interventions ou questions exprimées lors de la tournée régionale de la FDSEA. « Où va l’Europe », semblent exprimer de nombreux participants, conscients d’avoir été les acteurs de la seule véritable politique européenne, la politique agricole, et donc meurtris par cet abandon au profit du seul marché depuis la fin des années 90.
« On parle trop de lait et pas assez des autres productions depuis le printemps », tempête un jeune. « C’est vrai qu’il y a eu un élément déclencheur en instantané dans toute la France au printemps et c’est vrai que depuis, le dossier lait mobilise beaucoup d’énergie. Pour autant, des actions concernant la viande ont eu lieu aussi ces derniers mois, et l’action sur la transparence des marges est bien un problème transversal à tous les secteurs », ont expliqué les membres du bureau.
Transparence des marges
« Au fait, où en est-on sur ce sujet, on en parle moins aujour-d’hui ? De plus, quand on parle transparence des marges, la “Fédé” devrait aussi travailler sur la transparence des marges en amont de nos exploitations, chez nos fournisseurs, 33 % de marge sur les semences de maïs, c’est beaucoup ». « Oui, le combat sur le revenu est bien à la fois une question de baisse des charges et de meilleure valorisation de nos productions. Comme nos collègues de toute la France, nous manifesterons à Nantes pour interpeller le chef de l’État afin que le levier des charges franco-françaises soit actionné dans les plus brefs délais, et que les organisations économiques et mutualistes participent à ce nécessaire plan de sauvetage de notre agriculture », a répondu le secrétaire général Jean-Paul Piet.
« Et au-delà, comment voyez- vous l’avenir des aides d’urgence ?, s’interroge un responsable cantonal. Je vis cela comme une demande permanente de perfusion, ce n’est pas enthousiasmant pour avoir des projets sur mon entreprise ».
Débat sur l’organisation économique
« C’est vrai, une action syndicale qui ne concernerait qu’une demande d’aides n’est pas porteuse d’avenir. Elle est cependant indispensable pour passer un cap difficile. Si les difficultés de trésorerie se poursuivent sur plusieurs années, il y a un problème de fond sur le revenu. L’enjeu reste bien la question du prix des produits à la production et le revenu des
agriculteurs », résume Michel Brossier, responsable à la section viande bovine, à la réunion du Saumurois. Les débats sur le ou les schémas d’organisation économique ont, dès lors, alimenté une bonne partie des échanges. « On partage ce que vous nous présentez. Le problème, c’est que ça fait déjà plusieurs années que nous faisons des propositions pour redonner du pouvoir aux producteurs et rien ne bouge. Qu’est-ce qui pourrait changer la donne aujourd’hui ? », s’interroge un participant. « Tu as raison », répond Emmanuel Lachaize, qui présidait la réunion de la Vallée à Beaufort, nos propositions pour plus d’organisation et plus d’implication des producteurs dans la gestion de l’offre ne sont pas nouvelles. Ce qui change la donne, c’est qu’avant nous en parlions et les filets de sécurité étaient toujours en place. Le débat s’accélère depuis que les décisions de juin 2003 à Luxembourg provoquent les effets ravageurs que nous avions annoncés : dérégulation, volatilité ».
Additionner régulation et organisation
« L’interpellation du Président de la République à Nantes est aussi un appel à plus de régulation imposée par le politique à Bruxelles, mais ce cadre régulateur et amortisseur de crise que nous revendiquons n’exonérera pas les producteurs d’une organisation économique plus engageante pour les producteurs », indique Christiane Lambert. Un producteur de porcs exprime son septicisme sur la volonté de certaines coopératives de refaire monter les prix. « Tant qu’on ne mettra pas en place des outils de flexibilité pour gérer la mise en production et les volumes mis sur le marché, on poursuivra la logique des prix bas », déplore-t-il. « J’ai l’impression qu’on réinvente les missions de nos coops », s’interroge un autre adhérent. « On ne réinvente pas, mais les coops créées après guerre, dans une Europe à six, un marché protégé et des filières avec peu de transformations ont, elles aussi, changé de terrain de jeux. Le marché est le même pour tout le monde, dans un monde qui change, les outils doivent aussi évoluer. Par contre, nos fondamentaux restent d’actualité : défendre l’intérêt et le revenu des producteurs dans cette nouvelle donne. La contractualisation est une piste, nous y travaillons, justement pour que son contenu ne nous soit pas imposé. Le sujet ne se traite pas de la même façon selon les filières. En lait, nous ne devons pas attendre 2013 ou 2015 pour nous prendre en main », réagit Alain Cholet.
Des réunions tout l’hiver
À l’évidence, le travail de confrontation d’idées et de pédagogie ne fait que commencer.
Les échanges sont vifs en début de réunion, le débat se poursuit autour d’un verre de rosé ou de Layon, des dates pour de
prochaines réunions dans les cantons sont prises. « C’est au plus près des entreprises et des agriculteurs que les nouvelles pistes se dégageront, c’est là que nous serons tout l’hiver », conclut Jean-Paul Piet, secrétaire général.
PASCALE GÉLIN