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Femmes
Sortir de l’ombre

Un vent nouveau a soufflé sur les Sables-d’Olonne vendredi dernier. Les femmes de la mer et de la terre ont décidé de lever le rideau sur leur métier, leur engagement et leur vie.

Moment fort du colloque, le témoignage de trois femmes de marin et trois agricultrices qui ont fait partager leur choix de vie, leurs motivations et leurs souhaits.
Moment fort du colloque, le témoignage de trois femmes de marin et trois agricultrices qui ont fait partager leur choix de vie, leurs motivations et leurs souhaits.
© AA

Vendredi dernier, dans l’amphithéâtre du Centre des congrès les Atlantes, les hommes se comptent sur deux mains. Dans les rangs de la salle de l’auditorium, ce sont des femmes chefs d’entreprises, des associées, des salariées et des conjointes collaboratrices. À l’heure où les hommes pêcheurs et agriculteurs occupent le devant de la scène et tiennent les rênes des organisations professionnelles, les femmes de la terre et de la mer des Pays de La Loire ont décidé ensemble de sortir de l’ombre. Toute la journée leur a été consacrée sous forme d’interventions et de témoignages. L’économiste de la Chambre d’agriculture, Pierre-Yves Amprou, le sociologue Roger Le Guen ont tour à tour délivré leur analyse sur leur place dans les entreprises agricoles et de la  pêche, tout comme Pascale Pottier, responsable du service formation de la Draf, et le directeur de l’école des formations maritimes de la mer.

Six femmes passionnées et épanouies
L’après-midi, les parcours de trois agricultrices et de trois femmes de marins ont marqué et ému l’assemblée. Elles sont revenues sur leur histoire en décrivant avec passion leur parcours de formation, leur statut professionnel, leur vie de couple et familiale. Si elles partagent de nombreux points en commun, les femmes de marin ont  encore du chemin à parcourir pour faire avancer leur statut et leur offre de formation permanente. Virginie Laurent suit la comptabilité, la banque et les fiches de salaires des matelots du bateau de son mari. Pour autant, cette femme de marin a le statut de conjointe collaboratrice, mais ne touche pas de salaire. “J’ai décidé de vendre de mars à octobre des sardines le matin sur le quai de la Chaume aux Sables- d’Olonne, au retour du bateau de mon mari. Cette activité au contact des Chaumois et des touristes m’a bien épanouie”, témoigne cette petite fille de marin pêcheur. Nathalie Gendron, fille de citadins a épousé un marin de Noirmoutier. “Quand j’ai décidé de suivre mon mari, je n’étais rien. Puis, je suis devenue conjointe collaboratrice et aujourd’hui associée. Je prends en charge la gestion, les vivres pour 16 matelots répartis sur deux bateaux qui partent en mer de 4 à 12 jours”. Ce qu’elle trouve de positif dans ses choix : “la possibilité d’aménager des horaires et d’élever mes enfants”. Magali Bertaud est née dans une famille de mytiliculteurs de l’Aiguillon-sur-Mer. “Dès l’age de 14 ans, j’étais sur les bateaux à regarnir les bouchots  aux pieds des piquets. Quand mon père a pris sa retraite, nous avons formé une EUrl avec mon mari. J’ai été salariée, puis conjointe collaboratrice mais aujourd’hui, je veux être associée”. Magali s’est investie dans la vente des moules et ne compte pas son temps. Durant six mois de l’année, elle fait des journées de 10 - 12 heures. 

Ne pas être la femme de marin ou d’agriculteur
Les trois agricultrices partagent le même amour de leur métier. Qu’elles soient filles d’agriculteurs ou d’un autre milieu professionnel, avec une formation universitaire supérieure ou une formation agricole, elles ont en commun la volonté d’acquérir leur indépendance. “Je ne voulais pas  être femme d’agriculteur”, explique Véronique Lorin quand elle a épousé un paysan de la Mayenne. “J’ai été salariée du Gaec, puis conjointe collaboratrice et je me suis installée… C’est parfois difficile physiquement, mais formidable pour l’aménagement des horaires”. Imelda Figuereau, vigneronne en Loire-Atlantique, apprécie les différentes facettes de son métier. “Toute l’année, la vigne change. Je fais un métier très varié qui va de la production, la vinification, à la vente”. Bénédicte Lebouc a longtemps hésité entre le métier d’institutrice et d’agricultrice, mais quand son mari s’est installé en Maine-et-Loire, elle a fait le choix, après son troisième enfant, de s’installer à ses côtés. Pour elle, ce qui reste le plus difficile à trouver, c’est l’équilibre entre vie professionnelle et famille. “Quand on travaille en famille, on mélange tout. Pour trouver un équilibre, j’ai choisi de prendre des engagements en dehors de l’exploitation”.
Ce sont des femmes de tête qui ont conclu cette journée. “Les femmes de la mer et de la terre ont en commun de nourrir les hommes et les femmes et d’évoluer dans un monde d’hommes”, souligne Christiane Lambert, vice-présidente de la Fnsea. La première femme à avoir présidé le syndicat Jeunes agriculteurs a retracé les évolutions marquantes du métier d’agricultrice. “Nous avons fait évoluer le statut du conjoint collaborateur, le congé maternité et la sécurité dans les exploitations. Mais, nous devons encore faire face à des clichés, notamment sur notre place au sein des organisations agricoles.

Catherine Longueville

Témoignage

Bénédicte Lebouc, agricultrice à Auverse

Les agricultrices du Maine-et-Loire ont souhaité arriver la veille pour visiter la criée le matin du colloque. L’initiative vous a-t-elle séduite ?
Bénédicte Lebouc : Nos échanges conviviaux lors du dîner de la veille nous ont permis de faire connaissance et de confronter notre quotidien.
Nous avons bénéficié d’une visite privilégiée de la criée qui était très intéressante. Elle nous a permis d’acquérir des connaissances sur le milieu des marins pêcheurs et de pouvoir amorcer la discussion plus facilement avec les femmes de la mer.

Vous avez été sollicitée par les agricultrices pour témoigner sur votre parcours de vie lors de la table ronde. Pourquoi avoir accepté ?
C’est la première fois que j’avais l’occasion de témoigner. La préparation de mon intervention m’a obligée à me poser des questions auxquelles je n’avais jamais réfléchi : pourquoi est-ce que je faisais ce métier, ce qui m’attirait dans l’agriculture, est-ce que j’étais épanouie. Cette expérience a été très enrichissante.

Quel bilan tirez-vous de cette journée ?
Les interventions étaient variées et de qualité, sans tomber dans un discours féministe. J’ai vraiment apprécié la rencontre avec les femmes de marin et la découverte d’un milieu géographiquement proche mais qui m’était inconnu.
Plusieurs générations de femmes se sont côtoyées vendredi dernier. Leur combat pour obtenir un statut et les projets comme le colloque donnent tout son sens à la commission Agricultrices.

RECUEILLI PAR AURÉLIE ANDRIOT
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