Prix
"Toutes les conditions sont réunies pour réviser l'accord du 3 mai"
Hier jeudi, la FDSEA et JA ont mené une première action au Leclerc d'Angers. D'autres mouvements suivront, d'ici fin août, dans tout le département.
"C'est nous, les agriculteurs, qui sommes l'élément déclencheur pour revoir l'accord du 3 mai. Tous les critères sont réunis pour que les prix payés aux éleveurs soient revus dans le secteur du porc, de la volaille et de la viande bovine", indique Emmanuel Lachaize, secrétaire général de la FDSEA. Alors que les prix des matières premières ne cessent de s'envoler - entre la mi-juin et la fin juillet, le prix du blé a progressé de 60 euros/tonne par exemple -, la FDSEA et JA ont décidé, en pleine période estivale, d'enclencher une première action auprès de la grande distribution. Une délégation s'est donc rendue, hier matin, jeudi, auprès du Leclerc Camus à Angers. Objectif : montrer à la grande distribution la détermi-nation de la production pour faire appliquer cet accord. Les agriculteurs ont demandé à rencontrer les responsables du magasin. Des affiches ont été apposées sur les vitrines et aux abords de la grande surface, indiquant : "Aux agriculteurs les sacrifices, aux grandes surfaces les bénéfices".
Revenir à la table des négociations
"La difficulté, c'est que cet accord repose sur la bonne volonté de chacune des parties pour l'actualiser. La puissance publique s'est bornée, en l'occurrence, à prendre acte. "Si ce ne sont pas les producteurs qui bougent, les autres partenaires de la filière, transformateurs et distribution, ne bougeront pas", estime Emmanuel Lachaize. Pour autant, le secrétaire général de la FDSEA estime que les pouvoirs publics ne pourraient s'exonérer de jouer un rôle dans cette histoire. "Après ces actions, il faudra que les pouvoirs publics fassent appliquer l'accord. Ils doivent prendre leurs responsabilités de ce qu'ils ont fait signer". Et, pour le moins, qu'ils enjoignent tous les partenaires de la filière à s'asseoir à la table des négociations.Le ministre de l'Agriculture, Stéphane Le Foll a déjà fait savoir sa préoccupation et a saisi le secrétariat d'Amis, système d'infor-mation sur les marchés agricoles, basé à la FAO de Rome afin de suivre au plus près les évolutions des perspectives de récoltes et les marchés. "La forte augmentation du prix des céréales et du soja devient une préoccupation majeure au plan mondial. La situation actuelle mérite vigilance et prudence : vigilance pour suivre l'évolution des marchés mais aussi prudence pour ne pas alimenter les mouvements spéculatifs. De son côté, François Hollande, avait indiqué, le 28 juillet dernier, lors d'un déplacement dans le Gers : "les agriculteurs affrontent une situation tendue en raison du prix des céréales. Et le président de la République de préciser qu'il avait demandé à Stéphane Le Foll de "saisir les instances auprès du G20."
Prendre sur les marges
On sait que la forte hausse du prix de l'aliment du bétail est inéluctable. Coop de France Nutrition animale et le Snia (Syndicat national des industries de la nutrition animale) n'ont pas manqué de le souligner (cf AA 3/8/2012) : "si les techniques de formulation et le stratégies d'achats sur les marchés à terme permettent de lisser dans le temps l'impact des variations des cours des matières premières, ces mécanismes ont leurs limites lorsque toutes les matières premières connaissent sur une longue période des hausses de prix continues et fortes", indiquent les deux organismes. Il est donc logique qu'une répercussion de ces hausses soit appliquée sur les secteurs dont les prix de revient sont les plus touchés, la volaille, le porc, la viande bovine, et ce tout au long de la filière. Là où les choses se compliquent, c'est le contexte économique et la préservation du pouvoir d'achat. "On ne demande pas que les prix aux consommateurs augmentent, argumente Emmanuel Lachaize. On demande aux autres opérateurs, la transformation et la grande distribution, de rogner sur leurs marges qui sont importantes."
1er coup de semonce à Angers
Le coup d'envoi de l'opération se déroulait jeudi matin au Leclerc d'Angers. "Sous couvert de la préservation du pouvoir d'achat, on sait que Michel-Edouard Leclerc pressurise les agriculteurs", indique Emmanuel Lachaize. De plus, et pour l'exemple, il cite la politique de l'enseigne en matière de lait UHT ½ écrémé au niveau national vendu à moindre coût: "nous allons vérifier quel jeu joue l'enseigne d'Angers en la matière", prévient Alain Cholet, le président de la FDL. Mais l'action n'en restera pas là. Après Angers, "l'action sera déclinée au niveau départemental, les petites régions prendront le relais", prévient Emmanuel Lachaize. "Le même type d'intervention sera conduit sur Segré, Saumur, Cholet et Baugé. Et après ? "Si notre juste réclamation n'était pas entendue, après la période estivale, il faut s'attendre à une mobilisation massive".
MLR
Xavier Beulin : "repenser la politique de stockage stratégique interannuel"
C'est l'une des solutions du président de la FNSEA pour mieux appréhender les situations de tension agricole : il faut "repenser cette politique de stockage stratégique interannuel" en investissant "à travers des politiques publiques qui permettraient d'avoir un stock d'avance", a-t-il indiqué, le 7 août, à l'antenne de France Info. "Malheureusement, on paie ça comptant lorsqu'une situation de tension se fait jour comme c'est le cas aujourd'hui". En cause, selon lui : la "vision trop court-termiste" des dirigeants, "comme si on pouvait gérer l'alimentation et l'agriculture comme l'industrie, c'est-à-dire sans stock et sans stratégie sur le moyen et long termes", a-t-il déploré. "L'observation des marchés agricoles à travers le monde" a bien été mise en place par le G20 l'année dernière, a-t-il reconnu, mais "il manque un élément important : comment faire en sorte que l'on régule un peu plus les marchés financiers ?". Concernant la répercussion de la hausse des prix des matières premières sur le consommateur final, Xavier Beulin a rappelé "le besoin de négociation avec la grande distribution". "L'important, c'est d'avoir une certaine réactivité par rapport à ces marchés" avec une adaptation des prix à la hausse lorsqu'ils montent sur les marchés et "lorsque les prix baissent, réajuster à la baisse". "Cela me paraît normal que le consommateur profite de baisses comme il doit parfois supporter quelques hausses", a-t-il indiqué.