Segréen
Un même métier, des stratégies différentes
Assemblée du Cratéas sur le thème “éleveurs bien dans leur métier”.
Dans un contexte agricole en mutation, qu’est-ce qui motive les éleveurs, ceux d’aujourd’hui et ceux de demain ? Comment concilient-ils l’exercice d’un métier aux fortes astreintes, avec une vie sociale ?
L’antenne de la Chambre d’agriculture en Segréen a invité des étudiants en agriculture et des éleveurs en activité à croiser leurs regards. Pour les plus jeunes, c’est l’idée d’être son propre patron qui prime : “l’élevage me permettra d’être libre de mes choix”, envisage Erwan, en BTS Acse. “Je veux que mon outil de travail ressemble à ce que je suis”, complète Maxime. Des jeunes qui soulignent très vite leur exigence d’évoluer dans une exploitation où ils se sentent bien : “un outil propre, des bâtiments et un matériel à la pointe de la technologie, c’est cela qui me donnera envie de me lever le matin”, affirme un autre étudiant, Valentin.
Embauche pour alléger le temps de travail
Si tous disent la passion pour les animaux, ils affirment aussi vouloir “diminuer le temps d’astreinte”, pour “prendre du recul par rapport à l’exploitation, avoir des contacts hors du milieu agricole”, comme l’exprime Erwan. Ils veulent aussi, bien sûr, retirer un revenu correct. Comment s’en sortent leurs aînés ? Les trois éleveurs invités à témoigner ont des visions des choses sensiblement différentes, ce qui a permis de nourrir le débat, enrichi également par l’analyse du sociologue Roger Le Guen.
Frédéric Giboire est éleveur laitier en individuel. Après une période de salariat au Contrôle laitier, il a repris l’exploitation familiale. Mais face aux problèmes de santé de sa femme, il s’est posé la question de cesser l’élevage. Il a finalement choisi “d’investir dans une nouvelle salle de traite et un nouveau bâtiment veaux pour gagner du temps” et pouvoir en consacrer davantage à sa famille. Sans renoncer à sa passion pour un travail en lien “avec le vivant”. Il apprécie la “souplesse ” permise par le métier d’éleveur, fait appel au Service de remplacement, à l’entraide. Récemment, il a franchi un pas supplémentaire en embauchant, avec un voisin céréalier, un salarié pour les deux mois d’été. à présent, son leitmotiv est de limiter au maximum les investissements “pour pouvoir à tout moment cesser l’élevage”. “Quand on investit, on devient dépendant”.
Autre stratégie, celle de Simon Delaunay. En Gaec avec son père et son frère, l’éleveur en lait et taurillons se situe dans une logique d’investissement “sur du long terme” : nouvelles salle de traite, stabulation, hangar de stockage avec production d’énergie, distribution de l’alimentation automatisée, détecteurs de chaleur et de vêlage... “Ce qui me plaît, c’est l’innovation”, affirme l’éleveur. Si l’on n’est pas performant aujourd’hui, comment envisager l’avenir ?” éleveur de vaches allaitantes, Stéphane Bodier, a lui, fait le choix du groupement d’employeurs pour alléger la charge de travail. Il embauche un salarié un jour par semaine, en partage avec quatre autres agriculteurs. Une option qui lui permet de “décrocher de temps en temps” et de profiter de la vie de famille.