Interview
Blocage des abattoirs Bigard, un an après
Blocage des abattoirs Bigard, un an après
Il y a un an, les éleveurs bloquaient neuf des principaux sites du groupe Bigard. Ils exprimaient leur révolte et refusaient d'être plus longtemps "la variable d’ajustement de la filière". Rappelez- nous le pourquoi de ce bras de fer avec le principal groupe industriel français.
Mickaël Bazantay : à l'automne 2010, les éleveurs de viande bovine subissaient une grave crise de revenu depuis 2007, résultant de la flambée des coûts de production, avec l’explosion du prix de l’alimentation animale et des intrants. En parallèle, les prix des bovins payés aux éleveurs ne progressaient pas, en raison de la pression de l’aval, de la non transparence des prix. Il fallait agir.
Un an après, où en est-on ?
L’action de blocage de Bigard ne visait pas à fixer ou négocier un prix. Un accord de ce type aurait été illégal quel qu’en soit le cadre. La hausse des cours ne se décrète pas. Pour la FNB, il s’agissait d’obtenir des orientations et mesures favorisant la transparence et un meilleur équilibre de marché, à même de générer une hausse des cours.
Nous pouvons légitimement en mesurer les effets, cela même si les éleveurs confrontés à
une trésorerie catastrophique espéraient une évolution plus rapide et bien qu’il reste encore à obtenir pour restaurer totalement l’équilibre économique des exploitations.
Des avancées de fond ont été réalisées ou sont engagées, Et la priorité FNB du levier export pays-tiers a été validée et confortée. Par rapport à l’an dernier, le prix des jeunes bovins a augmenté de 65 à 70 cts par kg carcasse, les femelles allaitantes de 25 à 35 cts, la moyenne de l’ensemble des bovins de plus de 40 cts. En parallèle, l’engagement a été pris par la distribution de mettre en avant la viande française et redynamiser VBF. Constatons que les volumes importés en France ont chuté de 11 % par rapport à l’an passé.
Et sur la transparence ?
D’autres mesures de fond faisaient partie du paquet négocié dans le cadre de la feuille de route fixée sous l’égide du ministre, sur base des orientations de la FNB. Concernant l'obligation d’installation des machines à classer, le processus est en cours, avec réétalonnage des machines pour attester de leur conformité. Et en juin 2012 au plus tard, tout doit être en place pour tous les abattoirs de plus de 3 000 tonnes. Concernant la réforme du dispositif de cotations, les textes réglementaires et les dispositions de contrôles des prix fournis par les abatteurs sont en phase de finalisation pour une mise en œuvre début d’année.
L'observatoire des marges est des prix avait suscité bien des commentaires…
Sur ce volet, c’est encore “la bouteille à l’encre”. Mais nous ne lâcherons pas. Les pouvoirs publics doivent mettre à plat et surveiller les écarts entre prix producteur et consommateur.
Et la contractualisation ?
La contractualisation prévoit la prise en compte des coûts de production car la production ne se maintiendra que si les éleveurs parviennent à faire face à des coûts en forte hausse et à se rémunérer correctement. Un accord-cadre sur la contractualisation est en préparation à Interbev. Il demandera à ce que les contrats proposés aux éleveurs s’appuient, à la fois, sur un indicateur de marché mais aussi sur un indicateur de coût de production.
Quel enseignement tirez-vous aujourd'hui de cette action ?
La force de notre réseau syndical a permis de se faire entendre et de contrer la pression incessante de ses entreprises. Et le travail continue, chaque jour. C’est un combat permanent dans lequel les éleveurs sont engagés. Certes, rien n’est jamais acquis, il faudra compter également avec les aléas des marchés qui créeront à coup sûr, ici où là, des revers. Mais le cap est donné et il sera maintenu : la mobilisation active des éleveurs pour un juste prix de leur production.