INTERVENTIONS DES RESPONSABLES RÉGIONAUX
Environnement, accès au foncier, préoccupations du moment
Le foncier, enjeu majeur. Pour un peu, “on se serait cru dans une assemblée générale de Jeunes agriculteurs”, a relevé Frédéric Vincent mardi au Campus de Pouillé, soulignant que le renouvellement de la population agricole est un des indicateurs d’une croissance durable, et dénonçant les “dérives sociétaires”. Une assemblée de JA, tant la préoccupation autour de l’accès au foncier était dans les toutes les bouches des élus des petites régions. C’est le cas dans le Segréen. Jacques Mousseau se fait le porte-parole d’agriculteurs lassés par des “problèmes de gestion du foncier (qui) s’amplifient, créant un climat délétère dans les campagnes”. En faute ? “L’agrandissement démesuré de certains entrepreneurs et agriculteurs y compris de jeunes installés, peu scrupuleux sur le nombre d’actifs en agriculture, la pression mise par la lecture de la nouvelle Pac qui pousse à l’agrandissement par les aides versées à l’hectare….” L’éleveur segréen évoque aussi le désengagement volontaire de certains propriétaires fonciers qui ne veulent plus avoir de locataires et reprennent à leur compte le foncier dont ils disposent.
Cette évolution inquiétante a été constatée partout dans le département. Dominique Janus, pour le Baugeois, soulève le même problème dans l’est du Maine-et-Loire : “Des exemples de propriétaires qui ne veulent pas louer des terres, nous en avons plein nos cantons”. “Sans terre, pas de nourriture, rappelle le responsable syndical. Les jeunes agriculteurs peuvent avoir notre soutien dans leur opération Sacs de Blé”. Dans les Mauges, le développement des taillis à très courte rotation relève de la même problématique de la vocation nourricière des terres. Conséquences, le prix du foncier augmente, une hausse “majoritairement faite par les agriculteurs eux-mêmes”, pour Jacques Mousseau, qui dénonce les tarifs pratiqués : “les tarifs annoncés sur une exploitation de Challain-la-Potherie oscillent entre 10 000 et 15 000 euros l’hectare”. Les agriculteurs de la FDSEA rappellent la nécessité de s’impliquer dans l’élaboration des documents de planification foncière. “Nous souhaitons fortement que notre structure syndicale soit un interlocuteur privilégié et soit associé systématiquement aux travaux d’élaboration des Scot”.
Gérer l’eau, avec bon sens. Dans toutes les régions, les adhérents expriment la même difficulté à concilier l’esprit d’entreprendre et les règles environnementales. “Nous voulons juste du bons sens, de la raison, de l’équité et de l’égalité dans leur application”, a résumé Emmanuel Lachaize, secrétaire général de la FDSEA. Les agriculteurs l’ont redit, devant les représentants de l’Etat présents à ce congrès : ils veulent pouvoir créer des réserves d’eau pour stocker l’excédent d’eau d’hiver et parer à la sécheresse. Or la réglementation continue à freiner un certain nombre de projets. “Nous avons cru que la sécheresse de 2011 permettrait aux politiques de retrouver la raison, mais il n’en est rien. La situation ne s’est pas améliorée malgré les promesses du Président de la république”, rappelle Guy Caillault, pour les Mauges. Les agriculteurs “ne veulent pas opposer agriculture et environnement”. Ils ne sont “pas contre la compensation écologique en cas de modification, mais à condition qu’elle soit réalisée de manière intelligente et en concertation avec les différents acteurs du territoire”, précise-t-il. Frédéric Lachambre, représentant la région Layon Saumurois, exprime la même préoccupation : “Les agriculteurs de notre région, la plus sèche du département, se posent beaucoup de questions sur l’avenir de leur métier, notamment parce que l’accès à l’eau devient de plus en plus problématique”. Un accès primordial que ce soit en grandes cultures, en végétal spécialisé ou en élevage. “Aujourd’hui il est devenu quasiment impossible de constituer des réserves”, dénonce-t-il. Et les propositions de sites par l’administration sont souvent jugées par les exploitants en dépit du bon sens, car situées sur des points hauts. En 2011, les exploitants ont su gérer, avec notamment des restrictions volontaires l’utilisation de l’eau dans la Vallée afin d’éviter une interdiction totale de prélèvement en Loire. Alors qu’une association des irrigants se constitue dans le bassin de l’Authion, Patrice Jameron, responsable de la région Vallée, invite les agriculteurs à s’engager tous dans cette gestion collective. Toujours concernant l’eau, plusieurs intervenants ont abordé la question du drainage, signalant les difficultés croissantes à drainer les parcelles avec notamment la réglementation zones humides. Plus loca-lement en Layon-Saumurois, le projet de remise à l’état naturel du Thouet inquiète la vingtaine d’irrigants qui arrose à partir de ce cours d’eau. Cette modification se traduirait par un abaissement important du niveau de l’eau.
Environnement. Les exploitants agricoles craignent toujours un classement en zone vulnérable de l’est du dépar-tement, qui ajouterait des contraintes, notamment l’impossibilité de labourer l’hiver. Patrice Jameron lance un appel aux agriculteurs possédant des résultats d’analyse d’eau depuis 2006, avec les teneurs en nitrates, pour étayer le dossier à apporter à l’administration. Une initiative soutenue par Sylvain Marty, directeur des Territoires : “Les relevés réalisés aujourd’hui ne concernent que quelques points isolés. Il est donc important de réunir toutes les infos dont vous disposez pour nourrir le dossier”.
D’une manière générale, toute la complexité et le manque de lisibilité des différentes réglementations qui s’accumulent rendent difficile l’exercice du métier d’agriculteur : carte IGN pour les zones non traitées, carte BCAE pour les zones enherbées… Les agriculteurs de la Vallée demandent à nouveau, “une harmonisation des réglementations des cours d’eau et fossés sur la base de la carte BCAE”. Les représentants des Mauges demandent, eux, une évolution de la directive nitrates de la notion de d’équivalent animaux vers celle de quantité d’azote produite par espèce. Ils dénoncent la “stigmatisation” de la production porcine en France, où “le régime soumis à autorisation est cinq fois plus faible que la directive européenne”.
Un contexte économique plus favorable…
Il est peu évoqué cette année dans les interventions. Dominique Janus souligne avec satisfaction la bonne tenue des cours agricoles, en céréales, en lait, et depuis peu, en viande bovine, qui fait “revenir le moral dans les campagnes”. Même si les charges restent particulièrement élevées et atténuent cette embellie. La situation est en revanche très difficile “pour les producteurs de légumes et les horticulteurs, durement touchés par la crise”, rappelle Patrice Jameron, responsable de la région Vallée.
La future Pac doit tenir compte des actifs. Les agriculteurs des Mauges, dont Guy Caillault s’est fait le porte-parole, s’interrogent sur les conséquences des orientations prises par la Pac post 2013 pour leur région, notamment le verdissement. Ils s’estiment “les grands perdants de cette future Pac : le niveau des aides va diminuer et nos petites surfaces (52,5 ha de moyenne) ne permettront pas de compenser nos pertes”. Ils demandent donc, comme le font la FDSEA et la FNSEA, “que le paiement de base soit plus élevé sur les 50 premiers hectares, pour atténuer l’impact de la réforme sur nos exploitations et maintenir une certaine équité”. Le débat est ouvert aussi dans les Mauges sur l’opportunité d’un recouplage de la pmtva. “Un recouplage partiel pourrait être un bon compromis pour limiter l’écart de traitement entre les éleveurs bovins”. Concernant la nouvelle Pac, Jacques Mousseau souhaite qu’elle “ne soit pas une nouvelle fois un moment de déchirement entre les agriculteurs. Le courage syndical de l’ensemble de notre structure sera de mise pour affronter cette échéance”, et l’affronter, espère-t-il, le plus unis possible.