Maraîchage
Gérer les adventices grâce à la technique du faux semis
Le réseau Dephy* a organisé sa première rencontre pour les professionnels, mardi 16 octobre. Au programme, la technique du faux semis utilisée par les producteurs du réseau.
Avec la rotation et la solarisation, le faux semis est une des principales stratégies mises en place par le réseau Dephy pour diminuer le stock d’adventices présentes dans les sols. Le faux semis consiste à préparer le sol comme pour un semis ou une plantation. Afin de faire lever les adventices puis de les détruire, de préférence mécaniquement. Avantage : le faux semis débarrasse le sol d’une partie des adventices et permet d’optimiser le désherbage dans le rang. Un plus : le travail du sol réalisé réduit l’activité des limaces en détruisant leurs œufs et leurs abris. “La technique du faux semis est souvent conseillée, elle est dite facile, mais il y a certaines conditions à respecter pour qu’elle soit efficace”, a expliqué Rosalie Dutertre, ingénieur réseau fermes de références Dephy légumes 49.
De nouvelles références
Peu de références existent jusqu’ici en légumes. D’où l’intérêt de l’essai mené en 2011 chez huit producteurs du Finistère, par la Chambre d’agriculture 29. L’efficacité de un, deux, trois et même quatre faux semis a été évaluée sur chou-fleur, carotte, laitue. En moyenne, avec deux faux semis, on réduit les levées d’adventices de moitié. Avec trois, la réduction atteint 71 %, et avec quatre faux semis, 75 %. De nombreux matériels sont utilisables pour la destruction des adventices. Les meilleurs résultats, en Finistère, ont été obtenus par un agriculteur bio, avec une bineuse patte d’oie, à 3 cm de profondeur.
Conditions de réussite
Le travail du sol ne doit pas être trop profond. Sinon, on risque d’obtenir l’effet inverse de celui désiré. “Il ne faut pas intervenir en dessous de 9-10 cm, souligne Rosalie Dutertre. Dans l’essai en Bretagne, un travail fait entre 9 et 13 cm a engendré 30 à 37 % d’adventices en plus lors de la culture”. Autre conseil : il faut prévoir une petite irrigation afin de maximiser les levées d’adventices. Pour effectuer la destruction, il est conseillé d’intervenir au stade levée-cotylédons.
Pour réussir, il est aussi nécessaire de ne pas être trop pressé. “Le faux semis prend du temps : il faut se donner au minimum deux semaines, voire jusqu’à un mois avant la mise en place de la culture. Cela amène à modifier le calendrier des travaux”, note Rosalie Dutertre. De la préparation en amont, certes, mais moins de travail une fois la culture mise en route. L’essai du Finistère a montré que, dans le cas d’une culture de carottes bio et la mise en place de deux faux semis, les coûts de sarclage sont divisés au moins par deux.
S.H.
Témoignages
Jean-Philippe Le Bronec, Corné
“Je suis installé avec mon père depuis deux ans. Le faux semis n’est pas ici une technique nouvelle. Dans l’exploitation, mon père et mon grand-père le pratiquaient déjà. Nous le faisons pour les salades, les carottes, les navets et les choux, et ça marche bien. Sur salades par exemple, nous réalisons deux faux semis, espacés de 8 à 12 jours en fonction de la météo. Nous travaillons à 8-9 cm de profondeur maximum. Au moment de la plantation nous appliquons un herbicide suivi d’un arrosage. Ensuite, le binage prend le relais. Notre souhait, à présent, est de pouvoir augmenter la surface de production pour réaliser des rotations plus importantes.”
Laurent Bouchereau, Le Puiset-Doré“Nous faisons des faux semis pour les haricots et les choux depuis cette année. En avril, nous avons labouré une surface de 1,20 ha destinée aux haricots. Dix jours après, nous avons détruit les adventices levées sur la parcelle. Le faux semis est détruit à la bineuse. Nous avons réalisé de la même façon sept semis successifs de haricots sur la même terre, précédés à chaque fois d’un faux semis. Nous utilisons, en complément, une herse-étrille. Résultat : avant, nous appliquions deux désherbants chimiques sur haricots, aujourd’hui plus aucun. C’est d’autant plus intéressant que nous commercialisons la production en vente directe. Les clients sont très demandeurs de légumes sans phytos. Nous avons gagné en temps de travail et financièrement, c’est aussi plus intéressant. Le plus difficile, avant de passer à la technique du faux semis, c’est de s’ancrer cette façon de faire dans la tête.”