Pigeon
Il élève des pigeonneaux pour les tables gastronomiques
En quête d'une meilleure visibilité, la filière pigeon s'est restructurée et a fait récemment son entrée au Cravi, le comité régional avicole. Reportage chez Olivier Séchet, président de Pigeonneau de France.
En quête d'une meilleure visibilité, la filière pigeon s'est restructurée et a fait récemment son entrée au Cravi, le comité régional avicole. Reportage chez Olivier Séchet, président de Pigeonneau de France.
Avec 180 éleveurs professionnels en France, la filière pigeonneau de chair est une toute petite filière. Mais elle entend bien se faire connaître, sous la nouvelle bannière de l'association Pigeonneau de France*, fédérant des éleveurs de tout l'Hexagone. 70 % de la production est centralisée dans les Pays de la Loire (surtout la Vendée) et les Deux-Sèvres, avec des cheptels de quelques centaines de couples de pigeons à des structures plus importantes comme celle d'Olivier Séchet, et ses 2 000 couples. Les 6 structures d'abattage se trouvent dans la région. Ces dernières années, la filière a été fortement déstabilisée par le Covid, qui a privé les éleveurs de leur débouché, la restauration, principalement gastronomique. Elle a aussi subi les conséquences de l'influenza aviaire, avec un seul élevage contaminé mais avec une batterie de tests obligatoires avant départs à l'abattoir, très contraignants pour les éleveurs. Aujourd'hui, la filière a su rebondir et se porte bien, avec un équilibre offre-demande : "ça va, mais par défaut, car on a laissé un peu de plumes. Pas mal d'éleveurs ont arrêté, autant du fait de la crise Covid, que du fait de la pyramide des âges", souligne Jean-Luc Boyer, directeur de l'activité sélection chez Grimaud Frères et secrétaire de Pigeonneau de de France.
Créé de A à Z
Olivier Séchet, 47 ans, s'est installé en 2001, en double production, viande bovine blondes d'Aquitaine et pigeonneaux. Intarissable sur le sujet, il a découvert le pigeon adolescent et a voulu en faire son métier. Il a créé son élevage de A à Z. Ses volières, il les a montées lui-même, pour un montant, il y a 20 ans, de 60 000 € environ. Ses volières ont été réalisées en autoconstruction, avec l'aide de famille et amis. Il a investi la même somme dans le cheptel. Soit une installation pour cet atelier à 120 000 €. "Pour construire de tels bâtiments aujourd'hui, il faut compter 35 euros par couple, soit 70 000 € pour un élevage de 2 000 couples. Et 2 000 couples, c'est l'équivalent en termes de travail et de revenu, d'un mi-temps", précise Olivier Séchet. Ce type d'élevage avec un investissement de départ modéré, une certaine indépendance et une quasi-autonomie alimentaire, a tout pour attirer, estime le professionnel. "Cette filière peut aujourd'hui intéresser des gens qui veulent faire de la reconversion professionnelle, et qui cherchent une production complémentaire, compatible avec une vie familiale".
L'éleveur apprécie le côté artisanal de l'activité : "le fonctionnement, il est le même que le papy qui a ses trois couples au fond du jardin, et qui mange ses pigeonneaux. Cela, c'est aussi ce qui fait l'authenticité du produit". L'élevage professionnel a toutefois gagné en technicité, grâce aux progrès de la génétique qui sélectionne des individus pour la ponte et pour la chair. "Ce qui se consomme, c'est la poitrine, qui doit être bien large. Grâce à la sélection, on n'a plus de pigeonneaux à la poitrine pointue, comme on avait encore couramment il y a 25 ans", explique Jean-Luc Boyer.
Chacun dans son appartement
L'atelier compte 4 bâtiments de 500 couples. Dans chaque case ou volière, l'éleveur introduit 25 mâles et 25 femelles à maturité sexuelle (elle est atteinte à 6 mois). Ils forment des couples tous seuls, et un “appartement” de deux petits nids est attribué à chaque couple, qui revient instinctivement toujours dans ce même logis. Dix à douze jours après, les femelles commencent à pondre, à raison de deux œufs tous les 35 à 40 jours. Les mâles et les femelles couvent les œufs 18 jours, et les petits sont élevés au total pendant 30 jours, ce qui fait que les cycles se chevauchent. Les femelles ont 10 cycles par an.
Comme un lapereau
"Le pigeon est reconnu comme volaille mais il n'a rien d'une volaille, puisque les pigeonneaux sont élevés, couvés, nourris par les parents, sans incubation artificielle", fait remarquer Jean-Luc Boyer. À l'éclosion, le pigeonneau est "comme un lapereau, il reste au nid". Les parents le nourrissent au lait de jabot, puis aux céréales locales (blé, maïs, et un complément protéinique). "Je suis en quasi-autonomie alimentaire, grâce à des échanges blé contre maïs, car je ne produis pas de maïs grain", précise l'éleveur.
Export jusqu'au Japon
Le travail principal consiste à relever toutes les semaines les naissances survenues, de manière à prévoir les livraisons hebdomadaires de pigeonneaux. Olivier Séchet travaille avec l'abattoir ADP de Cerizay (79), qui achète les animaux, - entre 3,70 € et 4,20 € par pigeonneau en fonction de la période de l'année -, et se charge de la commercialisation. La viande se vend principalement en France, et pour environ 10 % à l'export, vers les pays asiatiques. Chaque semaine, des pigeonneaux de chez Olivier Séchet prennent ainsi la direction du Japon, ce qui fait la fierté de l'éleveur : "le pigeon, ça fait partie de l'excellence française, comme les grands crus !".