Interview
« Il faut dégager vers les pays tiers »
Guy Hermouet, Président de la section bovine FRSEA
Un accord interprofessionnel venait d’être signé au sein de l’interprofession viande bovine. De quoi s’agit-il ?
Guy Hermouet : Cet accord comporte plusieurs volets qui vont dans le bon sens : généralisation des machines à classer dans tous les abattoirs de plus de 3 000 tonnes d’ici 2012, harmonisation des suivi qualité par Normabev et les organismes de contrôle de l’État, centralisation de la remontée des informations d’abattage. Deux aspects de cet accord sont particulièrement importants pour les éleveurs : à partir du 1er septembre 2010, les informations d’abattage seront disponibles par internet au plus tard à 10 h le lendemain de l’abattage. Ce délai permettra à l’éleveur ou
à l’apporteur d’avertir l’interprofession régionale qui sollicitera Normabev en cas de litige. D’autre part, l’État va assumer ses responsabilités dans le contrôle des abattoirs ; il était temps : nous constations que les défauts de classement augmentaient actuellement dans de nombreux abattoirs.
La Commission européenne s’est déclarée favorable à réintroduire les farines animales dans l’alimentation des porcs et volailles, à certaines conditions ; est-ce une bonne nouvelle ?
Tout ce qui consiste à mieux valoriser les déchets d’abattoir est une bonne nouvelle pour la filière. En l’occurrence, la Commission européenne constate que le nombre d’animaux touchés par l’ESB est en forte chute : moins de 60 cas pour les 27 pays de l’Union en 2009. Elle en tire des conclusions et desserre l’étau qui entoure la filière viande. Il est donc proposé d’autoriser à nouveau, sous certaines conditions, les farines de viande pour les porcs, volailles et poissons et de relever l’âge minimum du dépistage. Là encore, les propositions vont dans le bon sens ; cependant, il faut maintenant attendre que les ministres et le Parlement valident ces propositions, ce qui peut prendre du temps. Par ailleurs, je regrette que l’on n’ait pas purement et simplement supprimé les tests ESB pour les animaux nés après 2001, car ces tests coûtent très cher à la filière.
Il y a quelques semaines, plusieurs régions, dont les Pays de la Loire, ont mené une action syndicale visant à bloquer les cotations ; qu’en est-il ressorti ?
Nous étions à cette époque dans une spirale baissière inexplicable. Notre action a au moins permis de stopper cette baisse des prix insupportable pour les producteurs. Mais l’action n’est pas terminée pour autant. Désormais nous mettons sous surveillance à la fois les entreprises et les grandes surfaces. Nous disons clairement aux entreprises qu’elles doivent arrêter de brader notre viande que ce soit dans les marchés intérieur ou d’export ; la guerre des prix vers le bas pour capter de nouveaux marchés n’est pas une bonne stratégie car elle affaiblit tous les maillons de la filière. Et nous disons aux grandes surfaces que nous allons surveiller de près l’étiquetage des produits mis dans les rayons. Il est inacceptable de voir des barquettes de viande sur lesquelles ne figure pas le pays d’origine de l’animal.
Les producteurs de viande bovine connaissent la crise depuis trois ans maintenant. Comment voyez vous l’avenir pour cette production ?
La situation dure depuis trop longtemps. Les jeunes qui souffrent et des éleveurs sont obligés de décapitaliser. C’est profondément anormal. Depuis une dizaine de jours, un afflux de viande pèse sur le marché : la sécheresse et la mauvaise situation économique des éleveurs provoquent des ventes importantes d’animaux. Il faut donc dégager vers les pays tiers.
Propos recueillis par
Jean-Paul GOUTINES - FRSEA