Végétal
La machine américaine qui doit sauver le Burley français
Nord et Loire-Tabac investit dans une machine à récolter le tabac Burley et un nouveau mode de séchage.
La coopérative Nord et Loire Tabac vient d’investir dans une toute nouvelle machine. Il s’agit de la première récolteuse au monde pour le tabac blond Burley. Pour les producteurs, cette innovation est une aubaine. Elle devrait rendre beaucoup plus rentable la production française de Burley, aujourd’hui pénalisée par le découplage des aides Pac et par le coût du travail. La mécanisation réduit considérablement le temps de travail, comme l’explique Jean-Pierre Cochard, président de la coopérative et producteur à Chavagnes-les-Eaux : “Les travaux de récolte du Burley demandent 250 heures à l’hectare, à 10 ou 12 personnes. Avec la machine, il ne faut plus que six heures, à deux, pour récolter et mettre les feuilles à sécher sur un cadre”. Outre la machine à récolter, Nord et Loire-Tabac a investi dans des cadres de séchage et une effeuilleuse, pour un total de 1,3 million d’euros, subventionné pour 13 % par la Région Pays de la Loire. “Un investissement conséquent, mais la mécanisation est un passage obligé, si l’on veut garder une dynamique de production”, souligne Jean-Pierre Cochard.
Une variété vouée à disparaître
La France produit 10 000 tonnes de tabac, environ la moitié de tabac blond Virginie, et l’autre de Burley, tous transformés dans une usine à Sarlat, en Dordogne. La récolte de Virginie et le séchage, réalisé en four, sont déjà largement mécanisés. Mais il n’existait, jusqu’ici, pas de solution pour le Burley, dont les feuilles sont récoltées en machine puis pendues à la main, sous des serres. Des serres occupées seulement trois mois par an à cet effet, et qui représentent un équipement gourmand en surface et peu rentable. Depuis la réforme de l’OCM tabacole qui a supprimé les aides liées à la production, la France a perdu 20 % des producteurs de Burley. La variété était vouée à disparaître. Or les deux variétés ont chacune une fonction particulière dans la fabrication des cigarettes blondes, le Virginie apportant plutôt le volume et le Burley, le goût. “Nous souhaitons pérenniser la production en remplaçant chaque hectare de Burley traditionnel perdu par un hectare mécanisé”, explique Jean-Pierre Cochard. En Maine-et-Loire, la première machine a traité cette année 20 hectares, l’optimum à atteindre étant 80 hectares, d’ici trois ans. “Au niveau national, l’enjeu est de conserver l’usine de Sarlat”, résume l’agriculteur. Le marché offre en effet des perspectives : la France ne produit qu’un quart de la consommation hexagonale de tabac. Malgré cela, le pays importe et exporte, si bien qu’une cigarette peut contenir des tabacs de 20 pays différents. Les enjeux liés à la production sont également bien intégrés par l’aval de la filière. C’est la firme Philip Morris, elle-même, qui a financé les recherches menées à l’université du Kentucky afin de concevoir la récolteuse.
S.H.
Repères
♦ En Maine-et-Loire : 45 producteurs de tabac cultivent 221 hectares.
♦ Sur le territoire de la coopérative Nord-et-Loire Tabac, qui s’étend du Nord à la Creuse, 120 adhérents cultivent 600 hectares (500 de Virginie, 100 de Burley).
♦ Dans le monde, cinq firmes se partagent le marché du tabac.
Jean-Marie Barbot, producteur
Le tabac, culture à haute valeur ajoutée
À Chemillé, Jean-Marie Barbot et son épouse produisent des céréales, des plantes médicinales, des graines potagères et du tabac. Ils élèvent aussi une cinquantaine de brebis sur des terres en coteaux. Le tabac ne couvre que 4 hectares, sur les 45 du parcellaire, mais il représente un tiers du chiffre d’affaires de l’EARL Saint-Éloi. “La production est contractualisée, cela nous donne une certaine sécurité, apprécie l’agriculteur. En plantes médicinales, le marché est complètement libre et les revenus plus aléatoires”. Producteur de tabac Virginie, Jean-Marie Barbot a cultivé cette année un hectare de Burley afin de tester la nouvelle machine.