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Le Gouvernement revient à la concertation sur le plan pollinisateurs

Dans le cadre du plan pollinisateurs, le lancement de la consultation publique sur l’arrêté «abeille» révisé, initialement prévue pour la fin décembre, a été repoussé au début de l'année et le texte officiel ne sera pas publié avant fin mars

© AA

« L’intention de la ministre de la Transition écologique était de boucler le texte d’ici quinze jours, alors que nous n’avions eu aucun écho sur nos propositions », souligne la présidente de la FNSEA, Christiane Lambert. En effet, dès le 6 août, dans le cadre de la dérogation sur les néonicotinoïdes accordée à la betterave, le ministère de l’Agriculture annonçait un plan de protection des pollinisateurs d’ici fin 2020. Pour honorer cet engagement de calendrier, les ministères de l'agriculture et de la transition écologique ont mis les bouchées doubles début décembre. Une manière, à n'en pas douter, d'essayer de faire passer la pilule du flop des néonicotinoïdes... Ainsi,a près une première réunion le 4 décembre, la structure du plan a finalement été dévoilée dix jours plus tard aux apiculteurs et aux autres filières agricoles, pour une consultation publique initialement prévue dès le 23 décembre.

Un calendrier mené tambour battant, qui avait suscité l'indignation de la profession. « C’était essentiellement le sujet phytos qui était traité, dans la précipitation, et sans écouter », déplore Christiane Lambert, alors que la FNSEA avait soumis dès l’automne plusieurs propositions, dont l’aménagement de zones mellifères. Le syndicat et ses associations spécialisées végétales proposaient en effet d'aborder la question apicole dans sa globalité, sans faire de focus uniquement sur la question phytosanitaire. Il y a eu moins deux autres risques majeurs pour les abeilles qui doivent être traités : la question du bol alimentaire des pollinisateurs et la question sanitaire, en particulier la menace que représente le Varroa pour les ruches.

Les agriculteurs refusent le travail de nuit

Le projet de révision de l'arrêté abeille prévoit des contraintes horaires, avec une utilisation des produits ayant la « mention abeilles » 3 h après le coucher du soleil. Une contrainte jugée « intenable techniquement, socialement et économiquement pour les filières agricoles françaises ». En effet, la profession met en avant la plus grande dangerosité des travaux nocturnes pour les opérateurs, la difficulté à trouver du personnel qualifié qui accepte cela, mais aussi l'impact sur la vie de famille, les conflits de voisinage, et bien sûr, les fenêtres météo, souvent trop courtes pour ne traiter que de nuit en période de floraison. Des positions relayées par plusieurs élus de la majorité présidentielle. « À quelle autre profession oserait-on faire l’obligation à travailler la nuit ? », s'émouvaient ainsi les députés Jean-Baptiste Moreau et Olivier Damasin dans un courrier envoyé à Jean Casteix le 14 décembre.

Retour à la concertation

Face à cette opposition, tant sur le fond que sur la forme, le Gouvernement a décidé de calmer le jeu et de revoir la méthode en repoussant la consultation publique le temps d'un dialogue nécessaire avec la profession. « Nous avons entendu les inquiétudes des uns et des autres. Il y aura bien une concertation qui tiendra compte des réalités de terrain et des conditions de travail », a confirmé Julien de Normandie. Pour le ministre de l’Agriculture, « il faut faire en sorte de répondre au principal enjeu des abeilles entre mars et juin, qui est d’avoir des zones nourricières ». Une vraie concertation aura donc bien lieu et le texte officiel ne serait ainsi pas publié avant la fin mars 2021.

Le risque d'un durcissement pour les AMM

Si des avancées sont à espérer sur l'épandage nocturne, l'inquiétude est forte sur la volonté du ministère de la transition écologique d’étendre la « mention abeilles » aux fongicides et herbicides. Un dispositif franco-français qui constituerait une nouvelle distorsion de concurrence. En outre, pour les firmes phytopharmaceutiques, l'obtention de la « mention abeilles » sur ces catégories de produits entraînerait de facto un durcissement des tests, donc des coûts, ainsi qu'un temps supplémentaire pour l'obtention des autorisations de mise en marché. Dans ces conditions, une diminution du nombre de produits est à craindre, et cela est encore plus vrai pour les usages mineurs. « Le ministère de la transition écologique cherche à supprimer des produits, ce qui va à l’encontre de nos moyens pour honorer le plan protéines », analyse Emmanuel Leveugle, administrateur de la Fop en charge de l’environnement.  De son côté, l’interprofession Terre Univia pointe le risque d'une réduction de la surface de colza hexagonale estimée à 120 000 ha, et rappelle qu' « avec 1,1 million d’hectares en 2020, la surface française de colza a déjà perdu 30 % depuis 2014 ». Un recul paradoxalement très préjudiciable pour les pollinisateurs pour qui le colza et les oléagineux constituent une part essentielle du bol alimentaire.

A.F.

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