Les éleveurs de pigeons vont y laisser des plumes
Production méconnue, et pourtant fer de lance de la renommée gastronomique française, l’élevage de pigeon bat de l’aile depuis le début de la crise du Covid-19.
Production méconnue, et pourtant fer de lance de la renommée gastronomique française, l’élevage de pigeon bat de l’aile depuis le début de la crise du Covid-19.
L’élevage de pigeons, ou colombiculture, fait face à une crise inédite et d’une ampleur inégalée. Comme la filière canard, caille ou pintade, cette production est fortement impactée par le Covid-19. La fermeture des restaurateurs et l’arrêt quasi-total de l’export rend les producteurs extrêmement fragiles. « Si on ne nous aide pas, dans 6 mois il n’y a plus de filière pigeon en France », alarme Fadil Bendeffou, éleveur au Louroux-Béconnais. Aux Pigeonniers de Champfleury, la baisse de chiffre d’affaires pour le mois de mars est estimée à 68 %. Le salarié de Fadil Bendeffou est en chômage partiel depuis le début de la crise. Le début du printemps constitue pourtant un temps fort, les pigeons produisant plus avec les jours qui s’allongent. « Certains éleveurs ralentissent les cycles, d’autres diminuent le cheptel », constate Fadil Bendeffou. Cependant, le pigeon « vit naturellement », et se régule difficilement. Un couple de pigeons est en activité durant 3 ans et demi, et la reproduction n’est pas standardisé. C’est cette spécificité de la filière qui en fait un fleuron de l’agriculture française, que l’on retrouve sur les plus grandes tables étoilées. Le revers de la médaille, c’est la difficulté pour la GMS d’intégrer ce produit à ses rayons. Les solutions pour écouler la production ne sont donc pas légions. « On peut congeler, mais le risque c’est d’inonder le marché à la reprise, faisant ainsi baisser les prix », constate l’éleveur. Or, avoir des prix hauts à la reprise normale de l’activité, espérée en octobre, « si on tient le coup d’ici-là », apparaît primordial.
Peu de soutien
La filière apparaît donc en grande difficulté, et avance sans garanties, hormis les
1 500 euros d’aide de l’état. Une somme dérisoire par rapport au manque à gagner des exploitations. « On n’a pas d’argent qui rentre, mais les factures continuent de tomber », déplore Fadil Bendeffou. L’éleveur, qui a 3 200 pigeons, craint la disparition, dans l’anonymat, de sa filière. « On ne se sent pas soutenu, et pas reconnu à notre juste valeur ». Toute l’année, les pigeons des 40 éleveurs dans l’Ouest viennent garnir les tables de nombreux restaurants. La crainte, c’est la fermeture de ces exploitations. Le pigeon, symbole de la gastronomie française, pourrait donc dans un futur proche être chinois. Une incohérence de plus dans la grande danse de la mondialisation.