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Pac
Paris mobilise 22 pays pour sauver la Pac

Vingt-deux pays étaient réunis à Paris, le 10 décembre, à l’initiative du ministre de l’Agriculture Bruno Le Maire pour prendre position en faveur d’une “Pac forte” pour l’après 2013.

C’est un réel succès diplomatique pour Bruno Le Maire : réunir les représentants agricoles de 22 pays européens, souvent au plus haut niveau, pour défendre la politique agricole commune, n’était pas l’exercice le plus facile. Ils sont venus dans le cadre prestigieux de l’Assemblée nationale. Objectif : leur faire signer une déclaration pour défendre une Pac forte pour l’après 2013. Un observateur de la Commission européenne était présent.

Diplomatie
En bon diplomate, le Français avait préparé un texte suffisamment vague pour rallier le maximum de pays, mais avec quelques engagements sur lesquels il sera possible demain de s’appuyer. Exemple, la notion de régulation : « Pour que les agriculteurs puissent investir et développer le potentiel agricole européen, affirme le texte, nous devons leur assurer un revenu stable et décent face à la volatilité croissante des marchés. Cela passe par une régulation européenne qui permette d’affronter les situations de crise… » Quant à savoir ce qu’il y a derrière le terme de régulation, la question n’est pas tranchée. Régulation des marchés ou des revenus ? Bruno Le Maire répond : « Il reste à indiquer ce que l’on met concrètement dans cette nouvelle régulation. » La veille, le ministre affirmait que « sur la future Pac, il y a en fait deux hypothèses possibles : soit une rénovation, avec des aides européennes qui varieraient en fonction de la situation de marché ; soit une refondation par laquelle on utilise des fonds actuellement consacrés aux aides directes pour faire de la régulation de marché. En tout cas, il faudra qu’on bouge sur les outils d’aujourd’hui. »

Régulation
Cette référence à une régulation s’accompagne de modifications que les défenseurs de la Pac se doivent d’accepter. Un paragraphe évoque “le défi environnemental” : « la politique européenne doit mettre l’agriculture en situation de produire mieux et de valoriser sa contribution positive à l’environnement ». Il y est aussi question de « paiements directs visant à traiter de façon égale des situations égales ». Autrement dit, c’est ouvrir la porte à des primes Pac plus égalitaires, entre pays de l’UE (une notion demandée avec insistance par les pays de l’Est dont la Pologne) et entre productions. Il s’agit donc de primes qui baisseraient quand les prix agricoles augmentent et inversement. C’est, en somme, abandonner le système des références historiques qui prévaut en France. De fait, s’il est volontairement très général, le texte de cet « appel de Paris » comme se plaît à le nommer Bruno Le Maire, peut ouvrir bien des chantiers pour conserver une Pac forte… mais pas la même qu’aujourd’hui.

Références historiques
Si l’initiative parisienne ne peut être que jugée avec méfiance par la commissaire à l’agriculture Mariann Fischer Boel, bientôt sur le départ, les deux positions pouvaient néanmoins trouver quelques points communs. Dans un discours prononcé le 3 décembre en Autriche, Mariann Fischer Boel, indiquait qu’il existait un « consensus politique fort » sur la nécessité de supprimer les références historiques pour le calcul des paiements directs. « Certains politiciens le clament haut et fort et d’autres se contentent de l’admettre discrètement. Mais il est clair que les citoyens n’accepteront pas les modèles historiques bien longtemps », faisait-elle remarquer. Mariann Fischer Boel « doute » cependant qu’il soit possible d’instaurer une aide strictement uniforme par hectare pour l’ensemble du territoire de l’UE. « Je pense que cela aurait plus de sens de commencer avec une aide de base qui varie en fonction du lieu selon des critères objectifs  certainement essentiellement environnementaux, mais aussi peut-être économiques », décrivait-elle, tout en se défendant bien de « préjuger des débats à venir ».
Les services de la Commission n’ont pas non plus d’analyse s’opposant radicalement à la position des 22 signataires de l’appel de Paris. Dans la perspective du débat sur l’avenir de la Pac, la direction de l’agriculture de la Commission européenne a décidé de se livrer à un bilan analytique de la Pac depuis sa création.


Filet de sécurité
Dans un premier document, la commission européenne souligne que les discussions politiques pour l’avenir devraient être centrées sur les trois catégories de questions suivantes :
– Comment convient-il d’ajuster le régime des aides directes pour qu’il soit perçu comme le plus équitable possible, tout en offrant à la fois un paiement faisant office de revenu de base et une rétribution pour les biens publics (environnement, paysage, etc.) ? ;
– Comment faire pour résoudre les crises de marché à l’avenir ? Comment s’assurer que l’intervention est utilisée comme un filet de sécurité, et existe-t-il un besoin pour un nouvel outil afin de contribuer à la stabilité du revenu agricole ? ;
– Comment accroître l’efficacité de la politique de développement rural tout en assurant un équilibre entre la défense d’une concurrence accrue, les préoccupations environnementales et les défis de l’économie rurale au sens large ? Comment mieux appréhender les inquiétudes liées au changement climatique ? ;
En fait, la question est surtout de savoir si les prochaines négociations budgétaires laisseront à la politique agricole commune des marges de manoeuvre pour répondre à ces questions. Un récent document diffusé par la Commission européenne répondait à cette question par la négative, prévoyant une baisse radicale (30 % à 40 %) du budget agricole européen.
C’est justement face à ce type de position, fortement inspirée par les libéraux et Britanniques, que Bruno Le Maire et ses 21 partenaires veulent réagir. Moins en précisant quelle Pac ils veulent qu’en réagissant contre une approche essentiellement budgétaire. « Nous n’avons pas du tout parlé budget », répétait Bruno Le Maire le 10 décembre. Pour lui, il faut d’abord fixer la ligne politique avant de parler argent.

Agrapresse

Christiane Lambert, présidente de la FDSEA de Maine-et-Loire

 

Régulation “post ou ante”

 

La politique agricole commune va être révisée. Qu’est-ce qui vous soucie dans cette réforme ?
Christiane Lambert :
la réforme importante de la Pac est annoncée pour 2013 mais le débat budgétaire a lieu dès maintenant. La Commission européenne, il y a un mois, a annoncé une baisse de budget de 30 à 40 %. Mais comment faire plus de régulation et de politique agricole, alimentaire et territoriale avec 40 % de budget en moins ?

Vous avez donc réagi ?
Depuis toujours, la FNSEA et JA réclament une politique agricole au niveau européen, avec des mécanismes de régulation. Michel Barnier, lors de la présidence française, avait réuni 24 pays pour une Pac active et volontaire. Le ministre de l’Agriculture actuel, Bruno Le Maire, reprend l’initiative, avec 22 pays seulement (manquent le Royaume- Uni, les Pays Bas, le Danemark, la Suède et Malte). Ces 22 pays affirment qu’il faut une politique agricole régulatrice marquée par les exigences écologiques, la légitimation des aides publiques et les garanties sanitaires. Mais sans précision sur ce que recouvre la régulation. C’est encore ambigu.

Cet appel a des chances d’aboutir ?
Il faut une volonté commune et un vrai budget. Mais il faut surtout savoir ce que ces instances entendent par le mot régulation. Il nous faut savoir si la régulation se fait “ante”, soit avant la mise en marché ou “post”, c’est-à-dire après coup, après la crise. Veut-on éviter l’incendie ou l’éteindre ?

Un exemple concret ?
Peu à peu Bruxelles a supprimé les mécanismes de régulation que nous connaissions (quotas, jachères…) qui géraient
l’adéquation entre l’offre et la demande et évitaient ainsi les crises. Désormais, Bruxelles propose une régulation “post” mise en marché, beaucoup moins efficace. On va donc gérer les crises, éteindre l’incendie au lieu de le prévenir. Les conséquences ne sont forcément pas les mêmes, en particulier pour les agriculteurs.

Un autre sujet préoccupant, c’est le revenu des agriculteurs pour cette année.
Les comptes provisoires des revenus 2009 sont très mauvais. Chute globale de 34 % du revenu qui s’ajoute à une baisse de 20 % l’an dernier. Tous les secteurs ne sont pas touchés de la même façon, mais certaines productions de Maine-et-Loire le sont particulièrement comme l’arboriculture ou le secteur des légumes. En lait, on enregistre aussi une chute de 54 %. En cause, la chute des prix et l’augmentation des charges.

Comment se présente 2010 ?
Il faut surtout espérer une meilleure tenue des marchés,
et éviter des importations massives à bas prix pour tous les secteurs.

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