Environnement
Programme d’actions nitrates : l’administration doit revoir sa copie
La profession dénonce les propositions aberrantes des ministères.
Après une première vague de modifications des arrêtés nitrates cet automne, un nouveau programme (le 5e) va entrer en vigueur mi 2013. Il sera constitué d’un cadre national, en cours de négociation, précisé dans quelques mois par des mesures régionales.
Pascal Laizé, responsable environnement à la FDSEA s’insurge : “Dans ce 5e programme, l’essentiel sera décidé par les ministères, nous aurons peu de marge d’adaptation au niveau local. Et à ce jour, les propositions de l’administration sont inacceptables, dénuées de bon sens agronomique et surtout sans fondement scientifique. Les FDSEA et JA des Pays de la Loire les condamnent vivement”.
Capacités de stockage : toujours plus. La lecture du projet d’arrêté national a de quoi provoquer la colère : les incohérences techniques se mêlent aux approximations juridiques. Un exemple : à partir d’une étude détaillée sur les capacités de stockage des effluents, le ministère simplifie, prend les valeurs les plus contraignantes et sort un tableau qui impose des capacités de stockage forfaitaires par type d’élevage. Pour la région, il indique entre 4,5 et 6 mois de stockage de fumier pour les bovins lait, allaitants, et engraissement ; 8 mois systématiques pour les fumiers de porcs et de volailles (qui ne pourraient plus être stockés au champ). Finis les Dexel, finie la prise en compte de l’assolement, des caractéristiques de l’exploitation. “C’est un retour en arrière. Inacceptable et lourd de conséquences pour les élevages qui n’ont souvent pas terminé le remboursement de leur mise aux normes. Nous exigeons de revenir à une approche technique, qui prend en compte les possibilités d’épandage réels sur l’exploitation”, poursuit Pascal Laizé.
Couverture des sols en hiver. Ayant compris que la couverture des sols à 100 % est une aberration, après de multiples échanges avec la profession, les ministères proposent quelques ouvertures. Le mulch après sorgho, tournesol et maïs grain devrait être reconnu comme couvert. Des dérogations sont prévues pour les sols argileux, bien que le seuil d’argile soit pour l’instant, trop élevé (on parle de 37 ou 45 %). Mais en parallèle, ils prévoient d’interdire totalement la destruction chimique des couverts. “On va se trouver en face d’impasses techniques, lors d’hivers doux, ou pour les techniques sans labour. Cela restreint les choix de couverts, et rend difficile l’adaptation à la rotation et aux caractéristiques du sol. Encore un exemple où l’administration oublie l’agronomie pour répondre à un dogme : le 0 phyto”, explique Frédéric Vincent, président de JA. Le pompon revient à l’exception suivante : “La couverture des sols n'est pas obligatoire pour […] les ilôts culturaux en agriculture biologique sur lesquels la technique du faux semis est mise en œuvre.” On se demande bien en quoi un faux semis bio piégerait mieux l’azote qu’un faux semis con-ventionnel.
Les parcelles en pente condamnées. Le premier projet d’arrêté prévoit d’interdire tout épandage (y compris d’engrais minéraux) en zone vulnérable si la pente est supérieure à 7 %. La position des responsables, résumée par Pascal Laizé, est claire : “il n’est pas question d’en rester là. Cela condamnerait des surfaces importantes de cultures, sans véritable justification technique : les cours d’eau sont déjà protégés par les bandes enherbées et des distances d’épandage, et l’azote ruisselle peu en surface. Nous demandons de revoir ce point, sur des bases techniques fiables”.
La définition des sols gelés peut aussi laisser perplexe : “Un sol est gelé dès lors que le passage d'un individu n'y laisse aucune trace de pas”. En pleine sécheresse en août, beaucoup de sols répondent à cette définition.
Les prochaines négociations avec les ministères sur le 5e programme, prévues en novembre, seront très certainement animées.